30 mars 2013

En direct du Lao bar team

Quand j'étais gamin, j'ai eu droit à ma dose de Joe bar team. Plus tard j'ai roulé sur les mécaniques des copains. Aujourd'hui j'ai une bécane. Avec l'ami Benjo on a traversé une partie du Cambodge et du Laos et on s'est éclaté au propre comme au figuré. C'est jubilatoire de déguster la route de cette façon. De pouvoir se lever aux aurores et d'aller à la rencontre du soleil dans un paysage karstique dément. Toutes les péripéties qui ont pu nous arriver... Je ne vais pas toutes les conter. Ces derniers jours, une m'a particulièrement marquée parce que je suis passé par toutes les émotions.
Il y a quelques jours, j'ai vendu la moto du Benjo à un guignol du nom de Mathieu, ça ne s’invente pas. Il n'avait jamais touché une moto de sa vie. Apres quelques cours de pilotage improvisés sur un parking de Vientiane le long du Mékong, nous avons décidé de tailler la route ensemble.
La première journée a été éprouvante, je crois qu’on a battu un record, huit heures pour 150 km. Beaucoup de temps passé au garage. Ici, la motobike règne en maitre sur les routes et vous pouvez trouver des garages dans chaque maison, tout le monde bricole plus ou moins. Plutôt moins que plus à dire vrai. C'est toujours un grand moment quand tu arrives pour faire réparer un truc et que tu repars avec d'autres problèmes, des boulons en moins, l'arrivée d'essence non rebranchée etc. Bref, le cirque.
Apres avoir rejoint le Benjo pour une dernière soirée, nous sommes remontés en direction de Luang Prabang. Quelle journée.

Les 4000 îles, premier collègue rider

La route est splendide et en moto, quel pied. C'est jouissif. Les motos étaient réglées aux petits oignons. Tout allait super. Un petit arrêt dans un garage improbable où les gens s'étonnent de voir deux blancs sur des motos vietnamiennes. Mais quel bon moyen de briser la glace. Et puis les rencontres sont toujours autant surprenantes. Ce jeune d'à peine quinze ans s'approchant de nous et commençant à nous taper la discute dans un français impeccable. Ici au milieu de nulle part, les mains dans le cambouis essayant d'expliquer mon problème d'embrayage à Gabert, le jeune nous enchaine du Molière. Je crois que je ne voyage que pour ces moments là. Ces pauses à un moment que l'on n'attend pas avec des gens tous plus attachants les uns que les autres. La moto offre ça. Des vieilles motos surtout ^^.
Plus tard un local nous roulera dans la farine en nous indiquant une mauvaise direction, qui nous mettra sur la réserve. C'est l'élément déclencheur du joyeux bordel qui va suivre.
Sur la réserve donc. Dans le nord du Laos, les stations se font très très rares et celles qui livrent du carbu sont rapidement à sec. Dans les villages tu trouves toujours des gars qui te vendent des bouteilles de sky reconverties en tord-boyaux pour moteurs. Y’a aussi ces barils colorés avec pompe intégrée. L'essence est tout aussi chère et d'une fiabilité douteuse. On traverse enfin une bourgade équipée, on demande à un local où l'on peut trouver de l'essence. Le mec nous répond tant bien que mal "à dix minutes". En fait il fallait comprendre à dix mètres. Je démarre et je me gare direct en voyant les barils. Le temps de descendre de moto, je ne vois pas Mathieu, l'autre, continue sa route sans me voir. Pendant deux bonnes heures chacun a vécu sa journée avec ses événements. Charpipo tu peux nous la conter ?

-    Pour ma part, je prends de l'essence et j'attends Mathieu, croyant qu'il a du mal à démarrer sa moto ou qu'il discute avec un gonze du coin. La pompiste commence à trouver louche que je ne la paye pas tout de suite. Je n'avais plus de monnaie locale, seulement des dongs vietnamiens et une carte de crédit. INUTILE ! Mathieu avait du liquide. Je commence à me dire qu'il a du passer sans me voir. Je lance quelques appels, personne ne répond. La pompiste revient avec la police. Hé merde !! Je m'attable avec les policiers, je leur explique ma situation. Ils ne comprennent rien mais tout le monde garde le sourire. Quelques villageois s'attroupent autour de nous. Tu parles, l'attraction. Je me dis bon, c'est la route de Luang Prabang, première destination touristique du pays, va bien avoir un bus ou des velocyclistes.
Quelques minutes plus tard, un bus de touristes thaï s’arrête. Je me précipite à l'intérieur. Leur guide, une jeune de 25 ans, parle un peu anglais. J'explique ma situation. Là-dessus elle prend le micro et raconte mon délire à tout le bus. Quelques secondes de suspension et comme un seul homme, une trentenaire de thaï commencent à me mitrailler, crépitements de flashs, je suis sous les feux de la rampe. Une femme à côté de la guide se lève et me file du fric en me remerciant. Surréaliste. Je n’ai toujours pas compris. Une fois réglé mes comptes, j'enfourche ma meule et met les gaz pour rattraper Mathieu. Et toi Mathieu, ta journée ?

Les Mathieu... vise l'équipe !

-        Perso je ne me suis pas inquiété, Mathieu (Charpipo) roule plus vite. C'est une route de montagne, les routes sont sinueuses. Tu ne vois pas forcement la tête du peloton même cent mètres devant toi. Au bout d'un moment, je commence à me demander. J'accélère de plus en plus. On devrait déjà être en panne sèche. Bon je me dis qu'il va m'attendre à la station (située à dix minutes selon les indications du local NDLR). En haut de la côte, arrive ce qui devait arriver, plus de jus. Je vois arriver un local avec sa bécane, il passe devant moi et coupe le moteur pour descendre. Tilt. Ok allez on fait la même. Heureusement en bas du col se trouve la station. Je fais le plein mais toujours pas de Mathieu. Je commence à me dire : putain il s'est barré. Il a file à Luang Prabang. C'est notre point de chute. Je reprends la route, croise un autre touriste motard qui me confirme n'avoir pas vu une seule autre Honda Win conduite par un blanc. Ok il est derrière, en panne ou s'est trompé de chemin. Reste plus qu'a attendre.
-   Putain mais il est où ? Ce n’est pas possible qu'il bombarde autant avec si peu d'expérience en bécane. Tiens c'est pas une Honda Win qui vient là... ah si, mais c'est pas Mathieu. Pourquoi le gars me fait des signes ? Pas le temps je fonce, j'enchaine il faut que je tempère mon excitation. Que la route est belle. On va encore arriver de nuit. Encore un virage puis un autre. Je suis où là ? Plus que vingt bornes avant Luang Prabang. Ok je m'arrête au prochain bled. Ça y est j'y suis. Ok j'appelle Mathieu.
-      Qu'est ce que je fais ? Je reste la ? Je rebrousse chemin ? Je file à Luang P... Hé mais c'est lui. Hé Mathieu !! Il fonce comme un dingue, je commence à secouer mes bras. Il peut pas me louper, il peut pas, il peut... Il est concentré sur sa conduite. Je cours récupérer ma bécane, je démarre à fond et j'appuie comme un cinglé. Mince un bus. J'attaque dans le virage. Oh merde, c'est une épingle. Je me déporte dangereusement, le vide est pas loin. Tiens bon, tiens bon. Je suis presque passé. Le trou !! évite le trou !! évi...
-         Ça sonne... Mathieu ? T'es où ? Moi, je suis dans un village, dans la vallée, plus très loin de Luang Prabang.
-         Je viens d'avoir un accident, je suis un peu plus haut.

Il faut bien vous dire que j'ai changé de couleur quand il m'a annonce ça. Bon il répond de lui-même, ça m'a rapidement rassuré. Je remonte vers le col et je vois la moto défoncée. Mathieu est assis, en état de choc. Quelques contusions, un genou en vrac mais ça va. On n’est pas sûr à propos d'un trauma. Trois locaux sont à côté de lui. Je comprends que pendant son vol plané, il a perdu son larfeuille et son téléphone. On cherche quelques instants, on retrouve son téléphone. Pas de portefeuille. Quelques instants plus tard un des trois gus nous ramène les papiers de la moto qui se trouvaient dans le dit portefeuille. Pour le reste, sans commentaires. Heureusement il n'y avait pas grand chose dedans : un peu de liquide, une carte de crédit. Je commence plus à m'inquiéter de l'état du Mathieu. Je me mets en travers de la route, deux bus de touristes arrivent de Vang vieng pour Luang Prabang. Personne ne s'arrête, des touristes prennent des photos... Super. J'apprendrai plus tard qu'un de mes potes cyclistes présent à l’intérieur a demandé au chauffeur de s’arrêter qui lui a gentiment répondu que ce n’était pas son problème. Je continue à m’agiter dans tous les sens au milieu de la route quand un van s’arrête. Un chinois de Shanghai. Il ne parle pas un mot d’anglais. On lui montre la moto, les contusions de Mat, on lui demande de nous emmener direct à l'hosto. Sur ce, le mec plein de bon sens et de reflexes de survie... prend son appareil photo et mitraille. C’est quoi le délire ?! Je crois n’avoir jamais autant été pris en photo en si peu de temps.
Direction l’hôpital. Pour une première journée dans le coin le plus touristique du Laos, c’est novateur.

Et un autre garage, un autre...

Conseil aux voyageurs : ne pas tomber gravement malade au Laos. L’hôpital ressemble à une école maternelle aménagée. C’est sale, insalubre et ouvert aux quatre vents. Un moulin, le bordel. Ils ont rarement l’occasion de voir des touristes. On passe assez rapidement. Diagnostic cool pour Mathieu. En clair pas de trauma. Mais le personnel en profite. Ils nous dressent une liste de médocs et de pansements, de quoi soigner tout un régiment. Je me retrouve a naviguer dans l’école pardon l’hosto pour trouver l’office de vente, à négocier le prix des soins. N’importe quoi.
Finalement on sen sort bien. D’autant que le chinois nous avait attendus sur le parking de l’hôpital, prépare un repas. Nous avons fini la soirée dans son van, à regarder une espèce de cirque érotico-ludique sur l’écran intégré, à boire du tord-boyaux. Le mec a traversé une partie de l’Asie dans son van. Les conversations étaient limitées mais la ponctuation était claire, une phrase, une gorgée.
Le soir on s’est retrouvés à loger loin du vieux centre, dans la partie laotienne de Luang Prabang, au milieu des garages et des karaokés. Pas très loin du bowling, le seul endroit qui ne ferme pas après le couvre-feu. Good to know.

Le frelon d'or : ces quelques semaines en moto à travers le Cambodge puis le Laos avec mes deux compagnons riders. La liberté à l’état pur. De la musique, des pensées douces et sauvages. Des paysages somptueux à des heures choisies.
Le fun de la semaine : voir ci-dessus
La pompe à vélo : Moi vendant ma bécane à Luang Prabang. Je m'en veux, putain ce que je m'en veux. Le retour aux réalités busitiques fut un cauchemar.

Charpi

Ps musical de Charpipo : Ajo, de Peter King
Ps musical de Benjo : A Walk, de Tycho

22 mars 2013


Un nouveau voyage

Avec la Birmanie je triche, je prends l’avion. Il est toujours impossible d’accéder au pays par la terre, sinon monter un commando avec des passeurs locaux mais c’est pas l’idée. Du coup je me retrouve dans un bon jet pour un direct Bangkok – Yangon. En deux petits jours passés dans la capitale thaïlandaise (Bangkok, pour ceux qui n’ont pas suivi), je ressens un peu la frénésie dont parlait Charpi il y a quelques semaines. Mais je ne m’attarde pas, la Birmanie m’attend. En réalité elle se contrefiche de ma venue mais ce n’est pas grave, je vais lui rendre visite.
La Birmanie c’est LE pays à la mode pour les touristes depuis deux petites années et les signes de démocratisation envoyées par la junte militaire. Un des pays les plus reclus qui s’ouvre enfin au monde. Et la mère de tous, The Lady Aung San Suu Kyi, qui a enfin le droit de citer. Je reviendrai dans un autre post sur ces sujets, qui conditionnent ce qu’est le pays aujourd’hui.
Aujourd’hui je vais plutôt vous évoquer mes deux premiers jours, dans la capitale, Rangoon, ou Yangon plutôt. D’ailleurs le nom officiel du pays est Myanmar, attribué par la junte en référence au nom d’il y a plusieurs siècles, Birmanie étant celui donné par les anglais durant leur occupation et mettant en avant un seul peuple, les birmans. Entre junte et colonisateur, fais ton choix !
Dans la capitale, qui abrite cinq millions d’habitants, on a l’impression de faire un voyage dans le temps. Il semblerait que l’on soit figé dans une ville coloniale des années cinquante. Le pays étant tellement pauvre, la ville n’a que très peu évoluée. En dehors d’un probable quartier riche que je n’ai pas parcouru, les bâtiments sont décrépis, le blanc de la chaux a laissé sa place au marron de la poussière et de la saleté, certaines fenêtres sont prêtes à se faire la male, les fils électriques et téléphoniques pendouillent un peu de partout, les vieilles devantures de magasins sont encore à moitié visibles (un peu comme en allant à la campagne on voit un bon gros « Suze » décrépi sur un mur grisâtre), et surtout dans la rue, on a l’impression que les birmans vivent un peu à la même époque. Aung San Suu Kyi le dit elle-même (eh bien si elle le dit alors…), à part les téléphones portables apparus il y a quelques années, elle n’a pas vraiment vu d’évolution dans la ville depuis des décennies.

Yangon Downtown

Direct live : dans le bateau entre Bagan et Mandalay (centre du pays), devant moi des marins d’eau douce scrutent les fonds du fleuve Irrawaddy, car le niveau est très bas c’est la saison sèche, il ne faudrait pas toucher…

J’ai adoré me promener dans ces rues, où il n’y a aucun sentiment d’insécurité malgré le désarroi dans lequel vivent ces gens. On dirait que chaque habitant est un commerçant tellement il y a des échoppes sur tous les trottoirs : fruits et légumes, t-shirts à l’effigie de la Dame, antiquités britanniques, bricoles en tout genre, restauration rapide locale… mais en me promenant je regarde plus les gens que les objets. De nouveau dans cette ville, je redeviens une bête curieuse aux yeux des gens, comme lorsque l’on se promenait dans des zones sans touristes.

Oups on a touché… le fond. C’est bon ça repart.

A Yangon, le foreigner ne s’éloigne pas souvent des sentiers battus, donc rapidement on se fait remarquer. Si certains regards sont quelconques, la plupart sont teintés de curiosité (« mais qu’est ce qu’il peut bien foutre ici celui-là… »), et accompagnés d’un sourire et d’un Mingalaba (bonjour). Les gamins sont souvent à fond. Comme au Moyen-Orient je suis parfois invité à prendre un thé ou partager quelques mots. Beaucoup baragouinent en anglais, ancienne colonie britannique oblige. Dans les zones à touristes du centre du pays, le contact est moins simple, déjà un peu plus intéressé.
Particularité bien birmane, les locaux (principalement les hommes) portent des longyi, une sorte de sarong que l’on attache sur le côté pour les femmes, sur le devant pour les hommes. Autre spécificité, les birmans (principalement les femmes et les enfants) appliquent sur leur visage une sorte de crème issue du thanaka, un arbre de la région. Cette crème a des vertus hydratantes et protège des rayons du soleil. Aujourd’hui les jeunes en appliquent aussi pour se donner un style, en rond sur les joues ou le front, c’est un élément de mode. En se promenant dans le pays on ne peut échapper à ces deux particularités locales. J’ai testé, j’ai aimé.
Tout comme on ne peut échapper à ces mecs aux dents rougeâtres dégueulasses crachant de partout des missives de la même couleur. « Mais va te brosser les chicos mon ami » ! Au début ça fait peur, puis j’ai compris. Beaucoup mâchouillent des noix de bétel, aux propriétés astringentes. Composé selon les recettes de feuilles de tabac ou de bétel, la noix de bétel, de la chaux (!) pour coller le tout, voire d’autres condiments. Malgré leurs sourires authentiques, on a l’impression d’avoir en face de soi un vampire rassasié. J’ai goûté, je n’ai pas aimé. On a demandé aux locaux, il parait tout de même qu’il est plus aisé de séduire avec des chicos immaculées. Ça rassure, on vit sur la même planète.

Tout en couleurs !

Plus que dans tout autre pays, les moines ont pignons sur rue. Avec généralement des robes rouge orangées, mais parfois rouge vif, jaune, safran, marron… et rose pour les nonnes. Ils ont tout âge.
Dans ma pérégrination, je passe au marché Bogyoke, marché « à touristes » même si on n’est pas à Luang Prabang. En dehors des habituels tissus, habits et autres babioles, on retrouve les pierres précieuses, dans ce pays qui regorge de rubis. Je vous en aurais bien ramené mais j’ai peur qu’elles eussent été fausses. A midi je mange dans un boui-boui du marché un mix de noodle, de papaya, de légumes fris, de sauces en tout genres, que la cuisinière de rue mélange avec ses grosses paluches. Très bon !
Sur la route de la Yangon River, je me fais happer par un devin, posé sur sa minuscule chaise. Celui-ci, escroc mais pas trop, me lis dans les lignes de la main… non vous ne saurez rien, je vous dirai dans quelques temps s’il avait vu juste. Mais bon on reste sur du positif (eh oui il lui faut des clients quand-même).
Je reprends la route et je me retrouve à l’embarcadère pour Dana, le quartier sur l’autre rive. Je grimpe avec quatre ados qui m’ont promis de me faire visiter le bled pour 3 $. Ils sont marrants et se débrouillent déjà très bien dans la vente de souvenirs aux touristes. On avait comprit que Yangon centre avait besoin d’un rafraichissement, mais alors là… un bon vieux ghetto où plus grand-chose ne tient debout si ce n’est 200 000 personnes. Je remarque qu’il y a des motos ! En effet dans le centre de la capitale, les deux-roues sont interdits depuis qu’un haut gradé en a vu un d’un peu trop près il y a quelques années. De la politique du fait-divers comme on n’ose rarement en faire. Ce qui nous donne probablement la seule ville du monde sans deux-roues, une énormité en Asie du Sud-est.

Kima l'ado de Dala Township, que je retrouverai deux semaines plus tard pour une nouvelle visite

Les ados sont sympas, ils m’emmènent dans les rues puis une pagode bouddhiste. Deux sont musulmans, deux sont bouddhistes, ils sont les meilleurs amis du monde. Cette tolérance ne se retrouvera malheureusement pas tous les jours lors de ce voyage. Au début obsédés par les quelques dollars pour une « visite » que je pouvais faire seul, ils me disent après deux heures de petite complicité qu’ils m’offrent la course. Ça fait plaisir de voir qu’ils ne sont pas encore obnubilés par l’argent. Je reprends la bateau, toujours plein de centaines de birmans, dont un probablement égaré, avec son petit costard.
Chaud bouillant en milieu d’aprèm, je rejoins la Paya Shwedagon, l’éblouissant temple bouddhiste premier lieu de pèlerinage du pays. Cette stupa (sorte de cloche) de dizaines de mètres de haut est recouvert de centaines de kilos d’or, et est bordée par des dizaines de plus petites stupa, lieux de prières et méditations en tout genre. Et des centaines de personnes la visite en continue. Des foreigners, mais surtout des locaux majoritairement bouddhistes, et des moines bien sûr. C’est tellement grand que l’on peut déambuler tout autour pendant de nombreuses heures sans s’embêter un instant, à regarder des processions, à écouter les chants, et simplement à se poser dans un coin avec le stupa dans le viseur. Ça m’a tellement plu que j’ai payé double pour revenir le lendemain, toujours au coucher du soleil.

Des gamins nus comme des vers gigotent dans tous les sens sur la rive gauche, ils nous font coucou et gueulent à tue-tête en jouant dans l’eau. Ça donne envie de prendre un bain…

Je rentre en prenant le bus. Pas évident de prendre le bon quand nos chiffres occidentaux n’ont pas traversé la frontière. Je monte par une porte creusée dans le bus pour retrouver des locaux vraiment étonnés de me voir parmi eux. La vraie porte se situe bien à gauche du bus, mais donne sur le milieu de la route, dangereux. Explication d’une autre énormité issue des cerveaux féconds de la junte militaire : la conduite à droite. Colonie britannique, on roulait à gauche dans le pays avec des voitures ayant le volant à droite, logique. Mais (car il y a un mais), féru de sciences divinatoires, une consultation de 1974 a conseillé au Général Ne Win d’adopter la conduite à droite. Mais les volants eux sont restés à droite, ce qui ne s’avère pas franchement pratique et surtout très dangereux… Encore un grand pas en avant de la connerie.

Paya Shwedagon, Yangon

En rentrant dans Yankin Township, chez Colin le couchsurfeur californien (les locaux n’ont pas le droit d’héberger des étrangers), je vois un gars avec la frontale vissé sur le crane lancer des décharges d’électricité dans une minuscule rivière ultra-polluée à l’aide de deux grandes baguettes. Il pèche. Après une coupe de cheveux à 0,9 € (bon c’est pas Jean-Louis David le gars), je rentre à la casbah. Ici depuis huit mois et parti pour rester quelques années ce jeune prof d’anglais en primaire et jongleur de feu aime ce pays et ces gens, tout en gardant sont style de la west coast. Un vrai Cali-burmese.  Même en quelques mois il voit l’évolution de la ville et de la société. La levée des sanctions économiques fait apparaitre une classe moyenne, qui, pour ce qui est du revers de la médaille, remplit la ville de voitures et de pollution, quasi imperceptible jusqu’alors.
Mais surtout le peuple a retrouvé l’espoir.
La suite au prochain épisode.

Le frelon d’or : les femmes ? Aie aie aie… Je commence à en avoir fait des pays mais là le podium en est tout chamboulé. On m’avait prévenu pourtant « elles sont magnifiques », et je n’ai pas été déçu. Pas toutes certes, mais quand même… Des visages harmonieux, des regards perçants, des sourires à faire tomber n’importe qui, ce tanaka qui donne un petit plus, et surtout cette classe. Un peu à la Aung San Suu Kyi encore une fois, avec ces longues robes de couleurs leurs donnant toute à la fois une douce féminité et une grande force. Bon je vais m’arrêter là, venez voir par vous-mêmes, surtout à Bagan dans le centre du pays. (Et comme je suis un grand timide, je n’ai pas trop osé prendre de photos). Par contre on ne tooouuuuccche pas ! C’est prohibé et je n’irai pas m’aventurer. Le bon côté de la chose c’est qu’on ne voit aucun vieux blanc avec une belle birmane au bras. Par ailleurs mesdames, les hommes sont également beaux (sauf ceux aux chicos de vampires), les plus beaux et classes d’Asie du Sud-est.
La pompe à vélo : déjà de nombreux enfants qui semblent voir les touristes comme des distributeurs ambulants… mais quand ils n’ont rien d’autres à se mettre sous la dent, c’est difficile de leur reprocher.
Le fun : les soirées birmano-occidentales avec l’équipe couchsurfing et les birmans, de très bons moments à base de Myanmar beer, de tanaka, de crêpes et « tartiflettes », de boules de feu…

Benjo

PS Musical de Benjo : pour toi Carmensita
PS Musical de Charpi : Baby Love de Diana Ross and the Supremes

10 mars 2013

Lao

Nombres de mes amis m’avaient parlé du Laos, et qu’en termes positifs. C’était un peu The place to go au sud-est asiatique, un pays encore vierge du consumérisme occidental et des hordes de touristes. Ça s’est plus ou moins confirmé, le pays s’ouvrant dernièrement à une vitesse effrénée aux devises touristiques mais où l’on trouve encore des trésors de nature et « d’authenticité ».
Ayant acquis de splendides motos Honda Win 110 (dont Charpi devraient nous parler prochainement), nous avons traversé le sud et le centre du pays à une vitesse… euh, ouai bon déjà on l’a traversé et ça n’est pas donné à tout le monde avec ces meules vietnamiennes acquises au Cambodge. Nous sommes passés par les 4000 îles, avons fait une étape au plateau de Boloven, à la grotte de Konglor, puis à Vientiane la capitale, Vang Vieng et Luang Prabang, l’ancienne cité royale. Puis Charpi a continué sa route vers le Nord et la France, et moi le Sud et la France aussi, un jour ou l’autre.

Entrant au sud du pays par le nord du Cambodge, nous voila aux 4000 îles. On n’est pas au bord de la mer mais bien le long du Mékong ce fleuve gigantesque. Des milliers d’îles donc, et surtout une pour les touristes, Don Det. Mais puisqu’on est malins et que l’on a suivi des conseils avisés, on est allés sur l’île voisine, Don Khon (il suffit de traverser le pont comme dirait George B.). Autant sur la première on se croyait dans un Ibiza local, autant sur la seconde on se retrouvait en terre presque inconnue. J’abuse un peu mais cette île est très paisible. Le village vie au rythme du soleil, lever tôt coucher tôt, rien ou presque entre 11h et 16h pour ne pas prendre de risques face aux grandes chaleurs.
On est étonné du bordel organisé qu’il règne dans ce village, et dans le pays d’ailleurs, peut-être plus encore qu’au Cambodge. Concernant les animaux par exemple, il en traine de partout, des poules, des vaches, des cochons… comment s’y retrouvent t-ils ? Ça n’a pas l’air de trop les perturber. Pour les gosses c’est pareil, ça gambade dans tous les sens, tu ne sais pas où ils habitent. Leurs parents semblent le savoir quand-même ça rassure. Et dans ces pays les gamins se débrouillent très tôt tout seul. A cinq ans ils pilotent un vélo taille adulte, à huit une motobike, à douze ils ont déjà leurs trois frères et sœurs et les courses à l’arrière. A part ça ils aident très tôt leurs parents sur les chantiers, dans les champs, pour gérer la fratrie et les clients, la cuisine. Vraiment démerdards. Envoyez vos gamins en stage ici s’ils sont ingérables, ils vont apprendre la vie, ce qui ne veut pas dire qu’ils seront malheureux à en voir les locaux, bien au contraire.
Sur cette île et les voisines j’ai particulièrement aimé deux moments. Déjà dès le premier soir, la partie de petang avec des laotiens rencontrés dans un troquet un peu plus tôt dans la soirée. Après avoir sympathisé autour de leurs quelques mots d’anglais (et surtout des fameuses Beerlao), ils nous invitent à un match international France – Laos. Piqués au vif après la perte de la première manche (ça se joue en 7 et non en 13 ils ne nous avaient pas prévenu), on s’est reprit pour finalement gagner avec brio la partie deux manches à une. Eh oui les gars faudrait pas oublier d’où vient ce jeu !
Mais surtout je garde en mémoire le coucher du soleil au milieu de l’immense Mékong, à la frontière lao-cambodgienne, avec au loin quelques un des derniers dauphins lamantins, un minuscule rocher où l’on accoste avec notre pécheur du soir, et une baignade dans le fleuve, en compagnie de quelques sympathiques foreigners. Une heure grandiose.

Aux 4000 îles

Puis on a filé Lao, plus au nord.
Au guidon de nos grosses bécanes d’Easy Rider, on dévale les routes à toute allure. Mais on est encore freinés, cette fois-ci par nos cargaisons, à savoir des passagères d’origines parigo-cannoises, Sonia et Alice, et leurs sacs. Par contre ce n’est pas le poids de leurs casques ni des permis officiels du Laos qui nous ont retardé. Allez, on the road again.
Les motos tiennent et nous voila sur le Plateau de Boloven. Pays du café et des cascades. Perso je ne suis toujours pas café malgré les tentatives mais je suis toujours cascades. Comme un enfant dans l’eau (ou devant le feu), je pourrais y passer des heures. On s’arrête dans les chutes d’eau de Tad Champi, Tad Yuang puis Tad Lo. Toutes sont différentes, toutes sont superbes. Plus ou moins hautes, avec un débit assez faible mais qui reste très puissant lorsqu’on s’aventure dessous. Quelques sauts et surtout les passages derrières les chutes d’eau… en plus il n’y a quasiment personne. What else ?! (non toujours pas de café, merci George C.).
On parlait des mioches un peu plus tôt : les cascades sont leur habitat, ils sont nés au sommet d’une chute d’eau ou de l’arbre voisin. A 6-8 ans ils grimpent des arbres trempés le long des cascades, ils sautent d’une douzaine de mètres en se moquant gentiment de mon hésitation, en gros à chaque faux pas ils peuvent y passer. Mais ils n’y passent pas, vraiment un autre monde…
Sur la route les villages du bout du monde défilent. C’est souvent le même plan : une route avec tout le long des maisons, rarement mitoyennes, et quelques voies perpendiculaires. Et il y a toujours de la vie, que ce soit des gamins, des animaux, des scooters… au guidon, ne jamais perdre sa concentration. Jamais Benjo, jamaaaiiiiis. Mais bon ce n’est pas bien grave, on ne passe jamais trop de temps avant de trouver un garage, ou appelons plutôt cela un lieu plein de cambouis et d’huile où des gars trafiquent les deux-roues avec trois-quatre outils, le résultat n’étant pas toujours au rendez-vous.

C'est nous en tout petit en bas !! A Tad Yuang

Puis on a filé Lao, plus au nord.
Laissant nos passagères filer l’aventure avec des anglais (ahah bien fait^^), et après une journée à 450 bornes, un exploit digne des plus grands explorateurs de ce monde, on arrive le lendemain matin à la grotte Konglor. Un phénomène naturel exceptionnel. Une grotte longue de sept kilomètres avec des ouvertures de chaque côté de la montagne. Et la rivière qui la parcoure nous permet de la traverser en barque… superbe. A l’intérieur, la largeur et la hauteur peuvent atteindre cent mètres. On se croirait parfois dans Le Seigneur des anneaux, puis je me dis qu’une course poursuite en bateau serait top pour un James Bond, et lorsque l’on voit apparaître au dessus de nos yeux une sorte d’immense coupole de dizaines de mètres de haut et de large, je me vois dans un Star Wars lors d’une bataille spatiale. Pour ton prochain film George L. (et j’en ai fini avec les George). Sérieux, on s’y croit ! A côté de ça, les stalactites et stalagmites magnifiquement mis en lumières par la Région Rhône-Alpes ne me font plus grand-chose.
Lors de notre pause de l’autre côté de la grotte, on s’est refait une partie de petang contre des locaux. On arrive à sept « on a gagné c’est bon ? », « non c’est en vingt », ah ouai d’accord c’est vous qui voyez, c’est pas ça qui va nous arrêter. Par contre plus tard on a perdu contre des anglo-finois au billard, ce qui est extrêmement plus embarrassant.

Puis j’ai filé Lao, plus au nord.
Charpi attendant son visa chinois à la capitale tout en y découvrant les soirées underground, j’allais passer quelques jours à Luang Prabang, ancienne capitale royale. Et j’ai prit un petit coup de bambou. C’est le problème quand tout le monde vous dit que c’est le plus bel endroit du pays voire du monde. Effectivement c’est splendide mais le tourisme de masse gâche un peu la quiétude bouddhiste laotienne. C’est encore pire à Vang Vieng, ville de fête et de drogues, où les foreigners restent entre eux, à regarder la série Friends qui passe toute la journée dans des dizaines de bars. Pourquoi ne pas faire ça chez soi ? (néanmoins on s’est adapté, voir le frelon d’or). Je ne veux pas faire le mec qu’est en communion avec les autochtones, qui rejette toute influence occidentale, vraiment pas, mais bon là ça vire au ridicule. Par exemple à Luang Prablang, les trois-quarts des touristes restent font des allers-retours dans la rue centrale avec son marché centrale… à touristes, certes tout en couleurs, mais dans la rue parallèle il y a le marché local, autrement plus dépaysant. Ou ces jap’ (entre autres) qui posent leurs trépieds et flashent les bonzes à un mètre de leurs têtes, lors de l’aumône matinale, le Tak Bat. Mais bande de crétins irrespectueux ! Et c’est pas comme si c’était pas indiqué à tous coins de rues de rester discret à ce moment là.
Par-dessus tout, je suis inquiet de constater le changement que cela entraine dans le comportement des laotiens. Si dans le sud ou dans d’autres endroits reculés, le contact semble sincère, ici on redevient des walking ATM (distributeurs ambulants). En parlant avec des expat’ français, ils nous disaient qu’en l’espace de trois ans, cela avait énormément changé, et que ça n’allait pas s’arranger, le tourisme étant appelé à se développer très fortement, passant probablement de sept millions de visites dans les quelques années à venir, contre deux millions en 2012.
Ma foi… Comme c’est triste. Au-delà de ça, et dès que l’on sort un minimum des sentiers battus, cette cité royale est magnifique, avec ces dizaines de temples, sa colline centrale le Phu Si d’où la vue est superbe sur la ville, le Mékong (encore lui), les montagnes environnantes. Une balade en petit bateau à moteur pour remonter le fleuve jusqu’aux grottes de Pak Ou (pleines de centaines de statuettes de Bouddha), une baignade dans les chutes de Tad Kuang Si… Sans se prendre la tête on peut aussi passer du très bon temps dans cette ville et cette région.


Pétang aux grottes Konglor

Et sans aller plus Lao, on rencontre beaucoup de moines.
On en croise de partout, et il est assez facile de parler avec eux. Dès que l’on montre un peu d’intérêt autre que photographique, ce sont eux qui engagent les conversations. Il est notamment aisé de les rencontrer en fin d’après-midi, après leurs chants-prières. La majorité de ceux que l’on croise en ville sont jeunes, en deçà des vingt ans, ils sont étudiants. Ils suivent à peu près les mêmes cours que les autres auxquels s’ajoute l’enseignement bouddhiste. Certains ont choisi d’étudier le bouddhisme, d’autres sont venus à la demande de leur famille, et la majorité arrêteront bientôt, pour suivre des études classiques ou travailler. Ceux qui continueront dans la voie deviendront moines, professeurs, masters…
Ces jeunes bouddhistes nous montrent un mélange de tradition et de modernité car nombreux sont ceux qui cachent sous leur robe orange un portable voire la tablette dernier cri, mais qu’ils usent avec parcimonie. Ils sont proches des jeunes de leurs âges, avec pour beaucoup les mêmes rêves et envies, les mêmes discussions et références. Cependant leur quotidien est rythmé tout autrement : levé à 4h, déjeuner, prière, aumône, études, dernier repas de la journée en fin de matinée, études, prière et coucher vers 22h ; et tout autrement également, les filles et garçons ne se rencontrent pas... De l’influence de ces étrangers sur leur quotidien, ils disent que cela ne les dérange pas, sauf quand l’irrespect est criant, lors de l’aumône matinale par exemple. Mais en toute situation, tous sont vraiment bienveillants, souriants, calmes…

A Luang Prabang, traversée d'un pont en bambou construit pendant la saison sèche

Allez, moi je vais là-bas, en Birmanie.

Le frelon d’or : la dernière soirée avec Charpi. Dans une ville pour faire la fête avec des foreigners qui veulent faire la fête. Plein d’aventures et de rencontres en quelques heures, comme tout au long de ce trip. Bonne route Gabert et passe le bonjour aux français !
La pompe à vélo : les touristes cons et la mauvaise influence du tourisme sur les mentalités locales (que ce soit au Laos ou ailleurs).
Le fun : les escrocs de la première petang aux 4000 îles, qui poussent discrètement les boules en te proposant une Beerlao, qui gueulent un coup quand t’es au max de ta concentration, qui comptent comme bon leurs semblent… mais toujours avec le sourire. Des bons tricheurs comme je les aime.

Benjo

PS Musical de Benjo : Sea Horse, de Devendra Banhart
PS Musical de Charpi : I heard through the grapevine, de Marvin Gaye

4 mars 2013


Une pige en Cambodie ?

Autant on a bossé avant de partir, autant maintenant on regarde les autres. Et perso je m’y fais bien. Faudrait trouver une astuce pour que cela devienne un vrai boulot (de regarder les autres bosser). Enfin bref, ici les trois-quarts de la population ne travaillent pas dans le tertiaire, au contraire plus de 80% vivent à la campagne et presque autant bossent dans le secteur primaire. C’est donc bien différent de par chez nous. Voila donc devant vos yeux ébahis un florilège de métiers observés au Cambodge ou de métiers qui pourraient exister. Au-delà de présenter ces jobs, cela permet de dresser un petit portrait du pays, via une autre porte d’entrée. D’ailleurs, je parle du Cambodge mais j’ai bien l’impression que cela concerne également un peu les autres pays du sud-est asiatique.

Pays abritant Angkor et ses magnifiques temples, le touriste pullule et les boulots s’y rapportant se sont multipliés en quelques années. En voici quelques uns.
Le must du top : les Tuktuk drivers. Ils sont les stars du pays à défiler de partout avec leurs vieilles motos et leurs remorques aux allures de calèches, à l’affut du moindre foreigner. « Tuktuk mister, lady ? Maybe for tomorrow ? ». Ils sont tous sympas et souriants, n’essaient pas toujours de t’arnaquer mais préfèrent les touristes chinois qui ne marchandent presque pas. A la nuit tombée on les voit souvent dormir dans leur remorque, ou dans un hamac accroché à leur deux-roues. Au cas où un client aurait besoin d’eux. Pour un peu moins cher, on peut aussi prendre une moto, seul ou à deux, mais évitez de monter à six comme le font certains locaux. Métier complémentaire et indispensable, les garagistes et autres bricoleurs en tout genre, que l’on trouve de partout. Ne vous en faites pas vous ne serez jamais en panne bien longtemps dans ce pays.
Les masseurs. A Siem Reap, ville voisine de l’immense région d’Angkor, on ne peut échapper aux foot massages et aux fish massages. Pour le premier et pour 3$ on se fait masser les pieds pendant une demi-heure (par des jeunes masseurs qui gagnent quelques dollars par jour pour payer leurs études) ; pour le second ce sont les mêmes conditions mais les poissons font le boulot (eux ne sont pas payés sinon par nos peaux mortes). C’est horrible au début, trop chatouillant. Donc la recette c’est de se mettre à penser à autre chose, à parler de n’importe quoi comme des derniers propos choisis de JF Copé, du cours de l’avoine au marché de Chicago ou de la très bonne forme de l’ASSE. Ensuite ça va mieux.
Les commerçants à touristes. De types divers. En ville les commerces sont fixes, remplis d’emplettes… à touristes. Mais bon, nous on ne rentre pas demain du coup on ne remplit rien, sinon des livres par exemple. Et tous sont faux, de pales copies. Mais à 80% moins cher on ne mégote pas trop longtemps et on fait le plein. A un foreigner tenant un fake bookstore, je lui demandais si ce n’était pas un peu risqué ce genre de commerce : « non non pas du tout ici c’est autorisé ». Bon. Sinon, devant les lieux touristiques le commerçant est mobile et vous suit gentiment en disant dans un bon anglais « buy for me buy for me ». Il a tout son commerce sur son vélo, ou a sa grande sacoche, et s’aide de son cou et de ses bras pour faire devanture.
Les restaurateurs. On mange assez bien au Cambodge, bien que cela soit moins diversifié qu’au Vietnam et en Thaïlande. S’il y a marqué 5$ sur la carte ne pas hésiter à demander 2,5$ en général ça passe. Point non négligeable pour des touristes français en perdition culinaire depuis quelques mois (même si ça va mieux dernièrement), les carrioles de crêpes Nutella-bananes. Un régal.
Les mini-vendeurs. Parfois on est doucement hélés par des personnes encore plus petites que les cambodgiens ! Si si, leurs enfants. Eh oui, ici tous ne vont pas à l’école, beaucoup semblent bien démerdards dès tout petit et quand leurs parents bossent au resto à côté, ils se baladent dans les temples, jouent entre eux mais en profitent aussi pour vendre des cartes postales ou proposer leurs services pour faire guide-aventure dans la jungle.
Hôteliers. Il en abonde également dans les zones à foreigners. Multi-polyvalents et relativement efficaces, ils assurent tout, de la lessive senteur barbecue (ça devait être l’étendoir qui était mal placé) à la réservation de bus dans l’une des dix compagnies qui assure le même itinéraire. On a pu observer, comme pour d’autres services à touristes, que de nombreux sont tenus par des étrangers. Mais les salariés sont bels et biens des locaux, avec le salaire qui va avec, environ 150$ par mois (même ordre d’idée pour les Tuktuk drivers par exemple). Parfois certains enchainent deux boulots pour doubler le salaire et s’autoriser quelques rêves (une nouvelle moto, une maison, un voyage).
Plutôt caché dans nos contrées, le plus vieux métier du monde s’affiche ouvertement ici. Toujours à Siem Reap, j’ai vu plusieurs foreigners embarquer des demoiselles après discussion du prix, comme ça, juste devant notre fish-massage. Et encore… Ce qui est vraiment dégoutant est de voir ces vieux blancs se promener avec ces filles… Pour certaines on doute vraiment de leur âge. C’est surtout le cas à la capitale, Phnom Penh (et encore plus sur le front de mer à Sihanoukville).

Les poissons préfèrent certains...

C’était donc la rubrique « job à touristes ». Mais on peut aussi croiser ce genre de travailleurs.
Les gars dans les rizières (comment on dit ?). 70% de la population vit de l’agriculture et la grande majorité dans la culture du riz. Après les ravages causés par les années de guerre, l’agriculture se restructure et la production est moins dans le dur. En bus, Tuktuk, moto, on ne peut manquer ces rizières et ces cambodgiens penchés sur leur plants.
Les maçons. La construction est un autre pilier de l’économie. Dans la capitale, les gratte-ciels poussent comme des champignons mais pas un n’est terminé, espérons qu’ils le soient un jour et que tout le pognon ne revienne pas (que) dans les poches des promoteurs et politiques. Plus original, les maçons à maisons sur pilotis. C’en est cafi ici, le long des rivières bien sûr mais parfois aussi à des dizaines de kilomètres, au milieu des forêts. On a du mal à imaginer les eaux inonder ces lointaines contrées, mais ici la saison des pluies ne fait pas semblant. Si vous avez besoin d’une maison sur pilotis, n’hésitez pas à contacter des maçons du coin, ils m’ont l’air aguerris.
Les arboriculteurs. Toujours plein de bons fruits ici, comme dans le delta du Mékong, c’est la régalade.
Les métiers d’eau. Nous ne sommes pas allés sur la côte cambodgienne, mais dans les terres aussi, l’eau a son importance économique. Avec ses poissons évidemment, le Mékong (et ses nombreux affluents) étant le fleuve abritant parait-il le plus grand nombre d’espèces de poissons au monde. Et ici aussi, les marchés flottants font lois dans certaines régions.
Les concessionnaires motos. Evidemment pour répondre à la demande, l’offre doit suivre. Et elle suit, il y a des magasins de partout, du neuf et un peu d’occasion. Mais ça reste un peu chéro, surtout pour des foreigners. On cherchait des motobikes à acheter avec Charpi, c’était sympa, on était accueilli avec des bières (y’a pas un souci là ?) et des grands sourires, mais à la fin c’est la même que dans une concession Peugeot ou BMW c’est trop cher, même si ce sont loin d’être tous des esc(r)ot^^. On a donc trouvé par petites annonces et connaissance de connaissance.
Les chiffonniers. Il n’y a pas ou très peu de ramassage des ordures ici. Et comme de partout, Saint-Plastique fait des ravages, il en traine ainsi de partout, les gens ne sachant pas toujours à quoi sert une poubelle. Et même s’ils le savent, il n’est pas évident d’en trouver une. Donc, avant d’enterrer et/ou bruler les déchets qui ne sont pas au milieu des champs et rivières, des locaux fouinent et ramassent ce qui les intéresse, principalement des bouteilles en plastique, afin qu’elles soient recyclées. Saisissant de voir à deux pas de la Pub-Street de Siem Reap un père et ses deux fils de huit-dix ans, chacun sur leurs vélos, à transporter leurs sacs en plastique remplis de déchets tout juste collectés.
Car si tout le monde semble avoir un emploi (même les enfants, c’est dire), la pauvreté est bien présente. Surtout, les inégalités sont frappantes, et à mes yeux, bien plus qu’au Vietnam. On croise dans la même rue une Lamborghini ronflante et un gars réparant des vélos et dormant sur place.

Garagiste-soudeur, un métier du présent et d'avenir

Mais, pays singuliers, le Cambodge et ses voisins semblent s’être penchés sur d’autres branches de l’économie, ou alors, devraient y penser. Il me semble qu’il y a de quoi faire. Voyez plutôt.
Chorégraphes chanteurs. Comme dans le reste de l’Extrême Orient et apparemment dans le reste du monde, le phénomène Gangnam Style fait des ravages notamment auprès des tous jeunes. Longeant le lac proche d’Angkor Wat, on voit un gamin jouant dans l’eau, avec les reflets du soleil, une vraie carte postale. « Oh comme c’est mignon ce bout d’chou ». En ce rapprochant avec notre pilote de tuktuk, on se rend compte qu’il chevauche sa monture imaginaire au rythme du Psy, on est mort de rire. Le lendemain, trois gamins à l’arrière d’un autre tuktuk chantent à tue-tête « sexy laaaady ». Avec les vieux chinois qui se déhanchaient sur ce rythme sur les places publiques, le père de mon couchsurfeur Long à Hanoi qui était au taquet sur la chorégraphie… Ça fait beaucoup et j’en passe. Et ils se débrouillent tous très bien, tout comme au karaoké ! Y’a un potentiel à ce niveau là, ça se voit (pour certains au karaoké c’est sincère).
Réalisateurs et autres métiers du cinéma. Si au Vietnam le cinéma semblait un peu plus diversifié, au Cambodge (et encore plus en Chine) on ne voit que des films de Jackie Chan ! On le voit de partout, ou alors c’est un enchainement de coïncidences extrêmement suspect. En même temps les autres films sont de qualité cinématographique très aléatoire. Pour être gentil. Mais les locaux semblent adorer.
Démineurs. En tout cas c’est que semblent indiquer nombres de t-shirt à touristes « Cambodia : danger – mines ». Et ce n’est pas forcément faux, de nombreuses zones étant toujours interdites.
Profs de chinois pour tuktuk drivers. Tous les pilotes de tuktuk parlant chinois sont probablement pleins aux as. En effet comme je vous le disais le chinois ne marchande jamais ou est très mauvais, donc ce sont les clients les plus recherchés. Mais ne parlant ni khmer ni anglais, ils cherchent n’importe quel driver parlant chinois et sont très généreux à leurs égards. Et en plus ils donnent double dose de pourboire. En fait prof de chinois ne rapportera pas grand-chose mais si les locaux venaient à apprendre la langue, c’est le jackpot assuré.
Flics anticorruption. S’il est institutionnalisé au plus haut niveau de l’Etat-dictature, les policiers de provinces semblent bien se servir également, notamment auprès des tuktuk drivers (encore eux) comme nous le signalait Socheat, pilote et Couchsurfer. Le seul souci en bossant dans l’anticorruption c’est que tu ne vas pas te faire beaucoup de collègues.
Nounou. Il y aurait surement de quoi faire sachant que 40% de la population a moins de 16 ans. Mais ces enfants, s’ils ne vont pas à l’école, semblent s’éduquer par eux-mêmes, dans les rues, les temples ou les champs…

Beng Mealea, près d'Angkor, ici les enfants se débrouillent seuls

Sensibilisateur à l’environnement. Combien avons-nous croisé de gamins balançant leurs sacs plastiques parterre avec leurs parents les laissant faire. Le résultat se voit en regardant autour de soi : de partout, des déchets, où que l’on soit. Espérons qu’un jour l’Etat mette quelques moyens, très peu suffiraient pour sensibiliser, c’est si simple.
Ingénieur fils téléphoniques et électriques. Alors là c’est LE job d’avenir. Mais quel foutoir géant ! Au-delà de l’aspect esthétique dont on fait abstraction rapidement (on essaie néanmoins tous d’en tirer des photos originales), comment font-ils pour s’y retrouver ? Il y a parfois une centaine de fils sur le même poteau, partant dans tous les sens. Régulièrement t’as des coupures de courant dans une maison, un quartier ou une ville, tu ne sais pas trop pourquoi. Ce n’est certainement pas la seule raison mais il y a quand-même peut-être quelque chose à gratter de ce côté.

Je vois que vous hésitez encore, mais ne vous en faites pas, quelque soit le boulot que vous choisissiez, ce sera avec une bonne équipe de potes, car au Cambodge tout le monde est détendu, de bonne humeur avec un bon gros smile tout naturel. Et ça, ça fait zizir.

Le frelon d’or : la semaine à Angkor, à visiter ces temples millénaires, pour certains perdus au milieu de la jungle et recouverts d’arbres séculaires. On croise des singes, on vie avec les bruits de la foret… Ça m’a rappelé un beau voyage dans le Chiapas mexicain où l’aventure était la même à Yaxchilan ou Bonampak. Ici le programme ressemblait à ça : visite le matin, sieste dans les temples puis coucher de soleil au sommet d’un autre, avant un petit repas local et le choix drastique du soir : fish massage ou foot massage ? Les poissons ont souvent remporté le match.
La pompe à vélo : ces vieux foreigners avec ces belles et (trop) jeunes cambodgiennes.
Le fun : l’acquisition de nos Honda Win 110 pour aller cabosser les routes du Cambodge et du Laos.

Benjo

PS Musical de Benjo : Holiday in Cambodia, de The Dead Kennedys
PS Musical de Charpi : Papa was a rolling stone, de The Temptations