22 mars 2013


Un nouveau voyage

Avec la Birmanie je triche, je prends l’avion. Il est toujours impossible d’accéder au pays par la terre, sinon monter un commando avec des passeurs locaux mais c’est pas l’idée. Du coup je me retrouve dans un bon jet pour un direct Bangkok – Yangon. En deux petits jours passés dans la capitale thaïlandaise (Bangkok, pour ceux qui n’ont pas suivi), je ressens un peu la frénésie dont parlait Charpi il y a quelques semaines. Mais je ne m’attarde pas, la Birmanie m’attend. En réalité elle se contrefiche de ma venue mais ce n’est pas grave, je vais lui rendre visite.
La Birmanie c’est LE pays à la mode pour les touristes depuis deux petites années et les signes de démocratisation envoyées par la junte militaire. Un des pays les plus reclus qui s’ouvre enfin au monde. Et la mère de tous, The Lady Aung San Suu Kyi, qui a enfin le droit de citer. Je reviendrai dans un autre post sur ces sujets, qui conditionnent ce qu’est le pays aujourd’hui.
Aujourd’hui je vais plutôt vous évoquer mes deux premiers jours, dans la capitale, Rangoon, ou Yangon plutôt. D’ailleurs le nom officiel du pays est Myanmar, attribué par la junte en référence au nom d’il y a plusieurs siècles, Birmanie étant celui donné par les anglais durant leur occupation et mettant en avant un seul peuple, les birmans. Entre junte et colonisateur, fais ton choix !
Dans la capitale, qui abrite cinq millions d’habitants, on a l’impression de faire un voyage dans le temps. Il semblerait que l’on soit figé dans une ville coloniale des années cinquante. Le pays étant tellement pauvre, la ville n’a que très peu évoluée. En dehors d’un probable quartier riche que je n’ai pas parcouru, les bâtiments sont décrépis, le blanc de la chaux a laissé sa place au marron de la poussière et de la saleté, certaines fenêtres sont prêtes à se faire la male, les fils électriques et téléphoniques pendouillent un peu de partout, les vieilles devantures de magasins sont encore à moitié visibles (un peu comme en allant à la campagne on voit un bon gros « Suze » décrépi sur un mur grisâtre), et surtout dans la rue, on a l’impression que les birmans vivent un peu à la même époque. Aung San Suu Kyi le dit elle-même (eh bien si elle le dit alors…), à part les téléphones portables apparus il y a quelques années, elle n’a pas vraiment vu d’évolution dans la ville depuis des décennies.

Yangon Downtown

Direct live : dans le bateau entre Bagan et Mandalay (centre du pays), devant moi des marins d’eau douce scrutent les fonds du fleuve Irrawaddy, car le niveau est très bas c’est la saison sèche, il ne faudrait pas toucher…

J’ai adoré me promener dans ces rues, où il n’y a aucun sentiment d’insécurité malgré le désarroi dans lequel vivent ces gens. On dirait que chaque habitant est un commerçant tellement il y a des échoppes sur tous les trottoirs : fruits et légumes, t-shirts à l’effigie de la Dame, antiquités britanniques, bricoles en tout genre, restauration rapide locale… mais en me promenant je regarde plus les gens que les objets. De nouveau dans cette ville, je redeviens une bête curieuse aux yeux des gens, comme lorsque l’on se promenait dans des zones sans touristes.

Oups on a touché… le fond. C’est bon ça repart.

A Yangon, le foreigner ne s’éloigne pas souvent des sentiers battus, donc rapidement on se fait remarquer. Si certains regards sont quelconques, la plupart sont teintés de curiosité (« mais qu’est ce qu’il peut bien foutre ici celui-là… »), et accompagnés d’un sourire et d’un Mingalaba (bonjour). Les gamins sont souvent à fond. Comme au Moyen-Orient je suis parfois invité à prendre un thé ou partager quelques mots. Beaucoup baragouinent en anglais, ancienne colonie britannique oblige. Dans les zones à touristes du centre du pays, le contact est moins simple, déjà un peu plus intéressé.
Particularité bien birmane, les locaux (principalement les hommes) portent des longyi, une sorte de sarong que l’on attache sur le côté pour les femmes, sur le devant pour les hommes. Autre spécificité, les birmans (principalement les femmes et les enfants) appliquent sur leur visage une sorte de crème issue du thanaka, un arbre de la région. Cette crème a des vertus hydratantes et protège des rayons du soleil. Aujourd’hui les jeunes en appliquent aussi pour se donner un style, en rond sur les joues ou le front, c’est un élément de mode. En se promenant dans le pays on ne peut échapper à ces deux particularités locales. J’ai testé, j’ai aimé.
Tout comme on ne peut échapper à ces mecs aux dents rougeâtres dégueulasses crachant de partout des missives de la même couleur. « Mais va te brosser les chicos mon ami » ! Au début ça fait peur, puis j’ai compris. Beaucoup mâchouillent des noix de bétel, aux propriétés astringentes. Composé selon les recettes de feuilles de tabac ou de bétel, la noix de bétel, de la chaux (!) pour coller le tout, voire d’autres condiments. Malgré leurs sourires authentiques, on a l’impression d’avoir en face de soi un vampire rassasié. J’ai goûté, je n’ai pas aimé. On a demandé aux locaux, il parait tout de même qu’il est plus aisé de séduire avec des chicos immaculées. Ça rassure, on vit sur la même planète.

Tout en couleurs !

Plus que dans tout autre pays, les moines ont pignons sur rue. Avec généralement des robes rouge orangées, mais parfois rouge vif, jaune, safran, marron… et rose pour les nonnes. Ils ont tout âge.
Dans ma pérégrination, je passe au marché Bogyoke, marché « à touristes » même si on n’est pas à Luang Prabang. En dehors des habituels tissus, habits et autres babioles, on retrouve les pierres précieuses, dans ce pays qui regorge de rubis. Je vous en aurais bien ramené mais j’ai peur qu’elles eussent été fausses. A midi je mange dans un boui-boui du marché un mix de noodle, de papaya, de légumes fris, de sauces en tout genres, que la cuisinière de rue mélange avec ses grosses paluches. Très bon !
Sur la route de la Yangon River, je me fais happer par un devin, posé sur sa minuscule chaise. Celui-ci, escroc mais pas trop, me lis dans les lignes de la main… non vous ne saurez rien, je vous dirai dans quelques temps s’il avait vu juste. Mais bon on reste sur du positif (eh oui il lui faut des clients quand-même).
Je reprends la route et je me retrouve à l’embarcadère pour Dana, le quartier sur l’autre rive. Je grimpe avec quatre ados qui m’ont promis de me faire visiter le bled pour 3 $. Ils sont marrants et se débrouillent déjà très bien dans la vente de souvenirs aux touristes. On avait comprit que Yangon centre avait besoin d’un rafraichissement, mais alors là… un bon vieux ghetto où plus grand-chose ne tient debout si ce n’est 200 000 personnes. Je remarque qu’il y a des motos ! En effet dans le centre de la capitale, les deux-roues sont interdits depuis qu’un haut gradé en a vu un d’un peu trop près il y a quelques années. De la politique du fait-divers comme on n’ose rarement en faire. Ce qui nous donne probablement la seule ville du monde sans deux-roues, une énormité en Asie du Sud-est.

Kima l'ado de Dala Township, que je retrouverai deux semaines plus tard pour une nouvelle visite

Les ados sont sympas, ils m’emmènent dans les rues puis une pagode bouddhiste. Deux sont musulmans, deux sont bouddhistes, ils sont les meilleurs amis du monde. Cette tolérance ne se retrouvera malheureusement pas tous les jours lors de ce voyage. Au début obsédés par les quelques dollars pour une « visite » que je pouvais faire seul, ils me disent après deux heures de petite complicité qu’ils m’offrent la course. Ça fait plaisir de voir qu’ils ne sont pas encore obnubilés par l’argent. Je reprends la bateau, toujours plein de centaines de birmans, dont un probablement égaré, avec son petit costard.
Chaud bouillant en milieu d’aprèm, je rejoins la Paya Shwedagon, l’éblouissant temple bouddhiste premier lieu de pèlerinage du pays. Cette stupa (sorte de cloche) de dizaines de mètres de haut est recouvert de centaines de kilos d’or, et est bordée par des dizaines de plus petites stupa, lieux de prières et méditations en tout genre. Et des centaines de personnes la visite en continue. Des foreigners, mais surtout des locaux majoritairement bouddhistes, et des moines bien sûr. C’est tellement grand que l’on peut déambuler tout autour pendant de nombreuses heures sans s’embêter un instant, à regarder des processions, à écouter les chants, et simplement à se poser dans un coin avec le stupa dans le viseur. Ça m’a tellement plu que j’ai payé double pour revenir le lendemain, toujours au coucher du soleil.

Des gamins nus comme des vers gigotent dans tous les sens sur la rive gauche, ils nous font coucou et gueulent à tue-tête en jouant dans l’eau. Ça donne envie de prendre un bain…

Je rentre en prenant le bus. Pas évident de prendre le bon quand nos chiffres occidentaux n’ont pas traversé la frontière. Je monte par une porte creusée dans le bus pour retrouver des locaux vraiment étonnés de me voir parmi eux. La vraie porte se situe bien à gauche du bus, mais donne sur le milieu de la route, dangereux. Explication d’une autre énormité issue des cerveaux féconds de la junte militaire : la conduite à droite. Colonie britannique, on roulait à gauche dans le pays avec des voitures ayant le volant à droite, logique. Mais (car il y a un mais), féru de sciences divinatoires, une consultation de 1974 a conseillé au Général Ne Win d’adopter la conduite à droite. Mais les volants eux sont restés à droite, ce qui ne s’avère pas franchement pratique et surtout très dangereux… Encore un grand pas en avant de la connerie.

Paya Shwedagon, Yangon

En rentrant dans Yankin Township, chez Colin le couchsurfeur californien (les locaux n’ont pas le droit d’héberger des étrangers), je vois un gars avec la frontale vissé sur le crane lancer des décharges d’électricité dans une minuscule rivière ultra-polluée à l’aide de deux grandes baguettes. Il pèche. Après une coupe de cheveux à 0,9 € (bon c’est pas Jean-Louis David le gars), je rentre à la casbah. Ici depuis huit mois et parti pour rester quelques années ce jeune prof d’anglais en primaire et jongleur de feu aime ce pays et ces gens, tout en gardant sont style de la west coast. Un vrai Cali-burmese.  Même en quelques mois il voit l’évolution de la ville et de la société. La levée des sanctions économiques fait apparaitre une classe moyenne, qui, pour ce qui est du revers de la médaille, remplit la ville de voitures et de pollution, quasi imperceptible jusqu’alors.
Mais surtout le peuple a retrouvé l’espoir.
La suite au prochain épisode.

Le frelon d’or : les femmes ? Aie aie aie… Je commence à en avoir fait des pays mais là le podium en est tout chamboulé. On m’avait prévenu pourtant « elles sont magnifiques », et je n’ai pas été déçu. Pas toutes certes, mais quand même… Des visages harmonieux, des regards perçants, des sourires à faire tomber n’importe qui, ce tanaka qui donne un petit plus, et surtout cette classe. Un peu à la Aung San Suu Kyi encore une fois, avec ces longues robes de couleurs leurs donnant toute à la fois une douce féminité et une grande force. Bon je vais m’arrêter là, venez voir par vous-mêmes, surtout à Bagan dans le centre du pays. (Et comme je suis un grand timide, je n’ai pas trop osé prendre de photos). Par contre on ne tooouuuuccche pas ! C’est prohibé et je n’irai pas m’aventurer. Le bon côté de la chose c’est qu’on ne voit aucun vieux blanc avec une belle birmane au bras. Par ailleurs mesdames, les hommes sont également beaux (sauf ceux aux chicos de vampires), les plus beaux et classes d’Asie du Sud-est.
La pompe à vélo : déjà de nombreux enfants qui semblent voir les touristes comme des distributeurs ambulants… mais quand ils n’ont rien d’autres à se mettre sous la dent, c’est difficile de leur reprocher.
Le fun : les soirées birmano-occidentales avec l’équipe couchsurfing et les birmans, de très bons moments à base de Myanmar beer, de tanaka, de crêpes et « tartiflettes », de boules de feu…

Benjo

PS Musical de Benjo : pour toi Carmensita
PS Musical de Charpi : Baby Love de Diana Ross and the Supremes

3 commentaires:

  1. Wouh I LOVE BIRMANIA, it looks like Cuba somehow!
    Have a good and safe trip men!

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  2. Salut Benjo !
    Mais qu'as tu fait de ta moto entre le Laos et la Birmanie?! et oui, j'essaye de suivre! Vendue ou perdue à la "petang" ou pour les yeux d'une belle étrangère ?!!
    Bisous et bonne continuation ! Nous t'attendons toujours à Bordeaux avec du bon pain, fromage et vin !!
    ps : moi qui croyait que les françaises étaient les plus belles !! lol

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  3. Non mais bien sûr ça allait de soi, toutes ça c'est des bêtises, les françaises d'abord oulala bien sûr (non de dla, faut que je sauve les meubles). Sur ce la moto je l'ai revendu à Mathieu, un gars rencontré en Laosie. Allez bi....
    And thanks Nayrouse ;-)

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