Un nouveau voyage
Avec
la Birmanie je triche, je prends l’avion. Il est toujours impossible d’accéder
au pays par la terre, sinon monter un commando avec des passeurs locaux mais
c’est pas l’idée. Du coup je me retrouve dans un bon jet pour un direct Bangkok
– Yangon. En deux petits jours passés dans la capitale thaïlandaise (Bangkok,
pour ceux qui n’ont pas suivi), je ressens un peu la frénésie dont parlait
Charpi il y a quelques semaines. Mais je ne m’attarde pas, la Birmanie
m’attend. En réalité elle se contrefiche de ma venue mais ce n’est pas grave,
je vais lui rendre visite.
La
Birmanie c’est LE pays à la mode pour les touristes depuis deux petites années
et les signes de démocratisation envoyées par la junte militaire. Un des pays
les plus reclus qui s’ouvre enfin au monde. Et la mère de tous, The Lady Aung
San Suu Kyi, qui a enfin le droit de citer. Je reviendrai dans un autre post
sur ces sujets, qui conditionnent ce qu’est le pays aujourd’hui.
Aujourd’hui
je vais plutôt vous évoquer mes deux premiers jours, dans la capitale, Rangoon,
ou Yangon plutôt. D’ailleurs le nom officiel du pays est Myanmar, attribué par
la junte en référence au nom d’il y a plusieurs siècles, Birmanie étant celui donné
par les anglais durant leur occupation et mettant en avant un seul peuple, les
birmans. Entre junte et colonisateur, fais ton choix !
Dans
la capitale, qui abrite cinq millions d’habitants, on a l’impression de faire
un voyage dans le temps. Il semblerait que l’on soit figé dans une ville
coloniale des années cinquante. Le pays étant tellement pauvre, la ville n’a
que très peu évoluée. En dehors d’un probable quartier riche que je n’ai pas
parcouru, les bâtiments sont décrépis, le blanc de la chaux a laissé sa place
au marron de la poussière et de la saleté, certaines fenêtres sont prêtes à se
faire la male, les fils électriques et téléphoniques pendouillent un peu de
partout, les vieilles devantures de magasins sont encore à moitié visibles (un
peu comme en allant à la campagne on voit un bon gros « Suze » décrépi
sur un mur grisâtre), et surtout dans la rue, on a l’impression que les birmans
vivent un peu à la même époque. Aung San Suu Kyi le dit elle-même (eh bien si
elle le dit alors…), à part les téléphones portables apparus il y a quelques
années, elle n’a pas vraiment vu d’évolution dans la ville depuis des
décennies.
Yangon Downtown |
Direct live : dans le bateau entre Bagan
et Mandalay (centre du pays), devant moi des marins d’eau douce scrutent les
fonds du fleuve Irrawaddy, car le niveau est très bas c’est la saison sèche, il
ne faudrait pas toucher…
J’ai
adoré me promener dans ces rues, où il n’y a aucun sentiment d’insécurité
malgré le désarroi dans lequel vivent ces gens. On dirait que chaque habitant
est un commerçant tellement il y a des échoppes sur tous les trottoirs :
fruits et légumes, t-shirts à l’effigie de la Dame, antiquités britanniques,
bricoles en tout genre, restauration rapide locale… mais en me promenant je
regarde plus les gens que les objets. De nouveau dans cette ville, je redeviens
une bête curieuse aux yeux des gens, comme lorsque l’on se promenait dans des
zones sans touristes.
Oups on a touché… le fond. C’est bon ça repart.
A
Yangon, le foreigner ne s’éloigne pas souvent des sentiers battus, donc
rapidement on se fait remarquer. Si certains regards sont quelconques, la
plupart sont teintés de curiosité (« mais qu’est ce qu’il peut bien foutre
ici celui-là… »), et accompagnés d’un sourire et d’un Mingalaba (bonjour). Les gamins sont souvent à fond. Comme au
Moyen-Orient je suis parfois invité à prendre un thé ou partager quelques mots.
Beaucoup baragouinent en anglais, ancienne colonie britannique oblige. Dans les
zones à touristes du centre du pays, le contact est moins simple, déjà un peu
plus intéressé.
Particularité
bien birmane, les locaux (principalement les hommes) portent des longyi, une
sorte de sarong que l’on attache sur le côté pour les femmes, sur le devant
pour les hommes. Autre spécificité, les birmans (principalement les femmes et
les enfants) appliquent sur leur visage une sorte de crème issue du thanaka, un arbre de la région. Cette
crème a des vertus hydratantes et protège des rayons du soleil. Aujourd’hui les
jeunes en appliquent aussi pour se donner un style, en rond sur les joues ou le
front, c’est un élément de mode. En se promenant dans le pays on ne peut
échapper à ces deux particularités locales. J’ai testé, j’ai aimé.
Tout
comme on ne peut échapper à ces mecs aux dents rougeâtres dégueulasses crachant
de partout des missives de la même couleur. « Mais va te brosser les
chicos mon ami » ! Au début ça fait peur, puis j’ai compris. Beaucoup
mâchouillent des noix de bétel, aux propriétés astringentes. Composé selon les
recettes de feuilles de tabac ou de bétel, la noix de bétel, de la chaux (!)
pour coller le tout, voire d’autres condiments. Malgré leurs sourires
authentiques, on a l’impression d’avoir en face de soi un vampire rassasié.
J’ai goûté, je n’ai pas aimé. On a demandé aux locaux, il parait tout de même
qu’il est plus aisé de séduire avec des chicos immaculées. Ça rassure, on vit
sur la même planète.
Tout en couleurs ! |
Plus
que dans tout autre pays, les moines ont pignons sur rue. Avec généralement des
robes rouge orangées, mais parfois rouge vif, jaune, safran, marron… et rose
pour les nonnes. Ils ont tout âge.
Dans
ma pérégrination, je passe au marché Bogyoke, marché « à touristes »
même si on n’est pas à Luang Prabang. En dehors des habituels tissus, habits et
autres babioles, on retrouve les pierres précieuses, dans ce pays qui regorge
de rubis. Je vous en aurais bien ramené mais j’ai peur qu’elles eussent été
fausses. A midi je mange dans un boui-boui du marché un mix de noodle, de
papaya, de légumes fris, de sauces en tout genres, que la cuisinière de rue
mélange avec ses grosses paluches. Très bon !
Sur
la route de la Yangon River, je me fais happer par un devin, posé sur sa minuscule chaise. Celui-ci, escroc mais pas
trop, me lis dans les lignes de la main… non vous ne saurez rien, je vous dirai
dans quelques temps s’il avait vu juste. Mais bon on reste sur du positif (eh
oui il lui faut des clients quand-même).
Je
reprends la route et je me retrouve à l’embarcadère pour Dana, le quartier sur
l’autre rive. Je grimpe avec quatre ados qui m’ont promis de me faire visiter
le bled pour 3 $. Ils sont marrants et se débrouillent déjà très bien dans la
vente de souvenirs aux touristes. On avait comprit que Yangon centre avait
besoin d’un rafraichissement, mais alors là… un bon vieux ghetto où plus
grand-chose ne tient debout si ce n’est 200 000 personnes. Je remarque
qu’il y a des motos ! En effet dans le centre de la capitale, les
deux-roues sont interdits depuis qu’un haut gradé en a vu un d’un peu trop près
il y a quelques années. De la politique du fait-divers comme on n’ose rarement
en faire. Ce qui nous donne probablement la seule ville du monde sans
deux-roues, une énormité en Asie du Sud-est.
Kima l'ado de Dala Township, que je retrouverai deux semaines plus tard pour une nouvelle visite |
Les
ados sont sympas, ils m’emmènent dans les rues puis une pagode bouddhiste. Deux
sont musulmans, deux sont bouddhistes, ils sont les meilleurs amis du monde.
Cette tolérance ne se retrouvera malheureusement pas tous les jours lors de ce
voyage. Au début obsédés par les quelques dollars pour une « visite »
que je pouvais faire seul, ils me disent après deux heures de petite complicité
qu’ils m’offrent la course. Ça fait plaisir de voir qu’ils ne sont pas encore obnubilés
par l’argent. Je reprends la bateau, toujours plein de centaines de birmans,
dont un probablement égaré, avec son petit costard.
Chaud
bouillant en milieu d’aprèm, je rejoins la Paya Shwedagon, l’éblouissant temple
bouddhiste premier lieu de pèlerinage du pays. Cette stupa (sorte de cloche) de
dizaines de mètres de haut est recouvert de centaines de kilos d’or, et est
bordée par des dizaines de plus petites stupa, lieux de prières et méditations
en tout genre. Et des centaines de personnes la visite en continue. Des foreigners, mais surtout des locaux
majoritairement bouddhistes, et des moines bien sûr. C’est tellement grand que
l’on peut déambuler tout autour pendant de nombreuses heures sans s’embêter un
instant, à regarder des processions, à écouter les chants, et simplement à se
poser dans un coin avec le stupa dans le viseur. Ça m’a tellement plu que j’ai
payé double pour revenir le lendemain, toujours au coucher du soleil.
Des gamins nus comme des vers gigotent dans
tous les sens sur la rive gauche, ils nous font coucou et gueulent à tue-tête
en jouant dans l’eau. Ça donne envie de prendre un bain…
Je
rentre en prenant le bus. Pas évident de prendre le bon quand nos chiffres occidentaux
n’ont pas traversé la frontière. Je monte par une porte creusée dans le bus
pour retrouver des locaux vraiment étonnés de me voir parmi eux. La vraie porte
se situe bien à gauche du bus, mais donne sur le milieu de la route, dangereux.
Explication d’une autre énormité issue des cerveaux féconds de la junte militaire :
la conduite à droite. Colonie britannique, on roulait à gauche dans le pays
avec des voitures ayant le volant à droite, logique. Mais (car il y a un mais),
féru de sciences divinatoires, une consultation de 1974 a conseillé au Général Ne
Win d’adopter la conduite à droite. Mais les volants eux sont restés à droite,
ce qui ne s’avère pas franchement pratique et surtout très dangereux… Encore un
grand pas en avant de la connerie.
Paya Shwedagon, Yangon |
En
rentrant dans Yankin Township, chez Colin le couchsurfeur californien (les
locaux n’ont pas le droit d’héberger des étrangers), je vois un gars avec la frontale
vissé sur le crane lancer des décharges d’électricité dans une minuscule
rivière ultra-polluée à l’aide de deux grandes baguettes. Il pèche. Après une coupe
de cheveux à 0,9 € (bon c’est pas Jean-Louis David le gars), je rentre à la
casbah. Ici depuis huit mois et parti pour rester quelques années ce jeune prof
d’anglais en primaire et jongleur de feu aime ce pays et ces gens, tout en
gardant sont style de la west coast.
Un vrai Cali-burmese. Même en quelques mois il voit l’évolution de
la ville et de la société. La levée des sanctions économiques fait apparaitre
une classe moyenne, qui, pour ce qui est du revers de la médaille, remplit la
ville de voitures et de pollution, quasi imperceptible jusqu’alors.
Mais
surtout le peuple a retrouvé l’espoir.
La
suite au prochain épisode.
Le frelon d’or : les femmes ? Aie aie aie… Je commence à en avoir
fait des pays mais là le podium en est tout chamboulé. On m’avait prévenu
pourtant « elles sont magnifiques », et je n’ai pas été déçu. Pas
toutes certes, mais quand même… Des visages harmonieux, des regards perçants,
des sourires à faire tomber n’importe qui, ce tanaka qui donne un petit plus, et surtout cette classe. Un peu à
la Aung San Suu Kyi encore une fois, avec ces longues robes de couleurs leurs
donnant toute à la fois une douce féminité et une grande force. Bon je vais m’arrêter
là, venez voir par vous-mêmes, surtout à Bagan dans le centre du pays. (Et comme
je suis un grand timide, je n’ai pas trop osé prendre de photos). Par contre on
ne tooouuuuccche pas ! C’est prohibé et je n’irai pas m’aventurer. Le bon
côté de la chose c’est qu’on ne voit aucun vieux blanc avec une belle birmane
au bras. Par ailleurs mesdames, les hommes sont également beaux (sauf ceux aux
chicos de vampires), les plus beaux et classes d’Asie du Sud-est.
La pompe à vélo : déjà de nombreux enfants qui semblent voir les
touristes comme des distributeurs ambulants… mais quand ils n’ont rien d’autres
à se mettre sous la dent, c’est difficile de leur reprocher.
Le fun : les soirées birmano-occidentales avec l’équipe
couchsurfing et les birmans, de très bons moments à base de Myanmar beer, de
tanaka, de crêpes et « tartiflettes », de boules de feu…
Benjo
PS Musical de Benjo : pour toi Carmensita
PS Musical de
Charpi : Baby Love de Diana Ross and the Supremes
Wouh I LOVE BIRMANIA, it looks like Cuba somehow!
RépondreSupprimerHave a good and safe trip men!
Salut Benjo !
RépondreSupprimerMais qu'as tu fait de ta moto entre le Laos et la Birmanie?! et oui, j'essaye de suivre! Vendue ou perdue à la "petang" ou pour les yeux d'une belle étrangère ?!!
Bisous et bonne continuation ! Nous t'attendons toujours à Bordeaux avec du bon pain, fromage et vin !!
ps : moi qui croyait que les françaises étaient les plus belles !! lol
Non mais bien sûr ça allait de soi, toutes ça c'est des bêtises, les françaises d'abord oulala bien sûr (non de dla, faut que je sauve les meubles). Sur ce la moto je l'ai revendu à Mathieu, un gars rencontré en Laosie. Allez bi....
RépondreSupprimerAnd thanks Nayrouse ;-)