29 avr. 2013

Les îles

Thaïlande côté jungle ou côté plage. J’ai choisi plage. Deux petites semaines sur les îles du Golfe de Thaïlande, entre Koh Phangan la bringueuse et Koh Tao la plongeuse. En trois temps plus un. Trois tops plus un flop. S’il y a des locaux de partout, je n’en n’ai vraiment rencontré que le dernier jour, et ils ne m’ont pas laissé la meilleure impression…
La Thaïlande pour les touristes.

Première étape, bringue à Kho Phangan.
Tous les mois lorsque la belle lune montre son plus clair visage, de tendres fous venus d’occident se concentrent sur cette île pour se dandiner aux rythmes des sound systems sur la longue et belle plage de Haad Rin. Je ne sais pas vraiment quand et comment est né ce rituel mensuel, pourquoi ici, mais ça fonctionne. Des dizaines de milliers (parait-il, j’ai pas compté) de jeunes se déhanchent toute la nuit à en oublier qu’ils sont en Thaïlande.
Une britannique me fait fort justement remarquer en début de soirée « ah tiens c’est la pleine lune »… MAIS TU M’ETONNES ! C’est un peu l’idée en fait.
C’est une bringue pour occidentaux, servie par des locaux. Le concept fonctionnant tellement bien, les soirées se sont multipliées, avec les noms originaux qui vont avec : la Full Moon Party donc, mais aussi la Half Moon Party, la Jungle Party, la Shiva Moon Party etc.
Et quand je dis « servie par des locaux », faut s’entendre, disons des non-occidentaux. Car en fait une bonne partie voire plus de la moitié des employés sont birmans. En effet, eux y trouvent l’emploi qu’ils n’ont pas dans leur pays, et les thaïs y trouvent des employés avec un salaire deux fois moins élevé.
Le premier jour, j’arrive à l’hôtel avec mon tee-shirt de touriste de Birmanie et bim les gars m’enchaînent en birman. Avec les quelques mots appris là-bas, mon soutien à la Dame, j’étais leur pote pendant tout le séjour passé avec eux. Encore mieux, ils arrivaient à comprendre quand je leur sortais mes quelques mots en birman ce qui n’était pas toujours le cas au pays. Excédés par leurs conditions de travail (payés 120 € par mois soit deux fois moins que les thaïs), ils planifiaient de faire une grève… Pas sûr que le droit et les patrons soient aussi flexibles qu’en France.

Party time !

J’avais ouïe dire pas mal de choses négatives sur ces fêtes : dangereuses, mauvaises musiques, mieux ailleurs… Certes la musique n’était pas grandiose, il y a toujours mieux ailleurs, mais à part ça, avec une sacrée équipe de Couchsurfeurs internationaux, j’ai passé trois supers soirées (oui parce que la journée on dort). Je n’ai pas vu une embrouille et assez peu de personnes mal en point malgré l’intensité festive, mais apparemment un mec s’est quand-même fait shooter quelque part sur la plage durant la nuit. Oups.
Original, on constate que l’on n’est pas en Europe quand à 4h du mat’, je vois quelques gamins de cinq six ans faire des châteaux de sable au milieu des bringueurs. Où sont les parents ? Ça n’a pas l’air de soucier grand monde, surtout les enfants.

Deuxième étape, plongée à Koh Tao.
Petite île de sept kilomètres sur trois au nord de Koh Phangan, cet îlot est le paradis des néo-plongeurs en bouteille. Inhabitée jusqu’en 1947, l’île risque de ne plus l’être de nouveau d’ici quelques décennies. J’exagère peu. Encore plus que sa grande sœur fêtarde, Koh Tao regroupe bien plus d’occidentaux que de locaux, des birmans pour beaucoup. Généralement, un proprio thaï, des manageurs et instructeurs occidentaux et des petites mains du coin.
La réglementation thaïe ne semble pas avoir atteint les côtes de cette île paradisiaque. Presque aucune de la quarantaine d’entreprise de plongée (comme tous les autres commerces) n’est enregistrée. Dès que les autorités du continent débarquent pour faire des contrôles, une première boite se fait choper, elle fait passer le mot aux collègues et l’île ferme pendant deux jours le temps que les inspecteurs reprennent le bateau. Si les scooters n’ont pas de casque (normal), ils n’ont pas de plaque non plus. Pas plus que les maisons n’ont d’autorisation ni d’adresse… malgré tout l’île est encore magnifique, préservée, ainsi que ces coraux même si cela semble tout de même évoluer.
Car si l’on pointe les côtés sombres du patelin, il y aurait de quoi faire. Par exemple, Koh Tao signifie « l’île aux tortues » car il y a quelques décennies, elle en était couverte, aujourd’hui il faut être plus que chanceux pour en apercevoir une. Et si l’on visite la belle décharge du centre de l’île, à peine cachée, ça fait un peu peur pour un si petit rocher…
Ces considérations durables (ou pas, du coup) ne m’ont néanmoins pas empêché de faire un peu de plongée en bouteille sur Tanote Bay, une adorable petite plage un peu à l’abris de tout, où sur la route d’accès on croise de bons gros pythons (ce qui a freiné mes ardeurs de mini-treks en tongues dans la jungle). A visiter ce splendide monde de Némo, j’ai retenu quelques leçons de mon instructeur Greg, des explications efficaces :
-          « Entre deux plongées il faut un moment de récupération, les intervalles de surface. Car il faut faire redescendre l’azote présent dans notre corps (que l’on inspire en grande quantité dans les bouteilles) avant de replonger. Il faut du temps ! C’est simple c’est comme après une cuite, il faut un peu de temps de récupération. Et plus tu bois (plonges profond et longtemps) plus tu auras besoin de temps de récupération surtout si tu prévois de reprendre une grosse cuite (profond et longtemps) ». Limpide.
-          « Concernant la Narcoze à l’azote, c’est la même chose. Avec la profondeur, à partir de 25 mètres, l’azote a un effet anesthésique, avec parfois des attitudes insensées, de l’anxiété ou une fausse sécurité. Comme l’alcool. » Ok. Je tiens à signaler ici que Greg ne boit pas d’alcool.

Partie de pèche

Troisième étape, apnée à Koh Tao.
Ce n’était absolument pas prévu, ça m’a mit dans la mouise pour les jours suivants (voire étape 4) mais ça a été le gros bonus du séjour, qui se déroulait déjà au mieux. Rien d’exceptionnel en soi, aller sous l’eau sans bouteille. Comme des poissons. Bon d’accord ce n’est pas complètement naturel. Mais avec quelques techniques de relaxation, de respiration, une meilleure connaissance des réactions de notre corps dans ces moments, on prend vite du plaisir. Et l’on monte dans les minutes comme l’on descend dans les profondeurs. Sawatdee Jean Reno come stai ?
Mon niveau de débutant ne me permet pas d’observer le monde sous-marin aussi bien qu’on peut le faire en bouteille. Mais les sensations sont incroyables quand on se retrouve dans les (petites) profondeurs, à profiter de la sensation d’apesanteur dans ce grand bleu, ce nouvel habitat, cette eau à 30°… On en profite car on a confiance dans les capacités de notre corps à gérer la situation. A essayer m’sieurs-dames !

Tanote Bay à Koh Tao. Personne ou presque de ce côté là de l'île...

Quatrième étape, retards Surat Thani.
Ayant traversé des pays qualifiés de louches par le gouvernement australien, ce dernier me demande de faire une radio des poumons pour savoir si je ne vais pas lancer une épidémie en éternuant à mon arrivée sur leurs terres. Rendez-vous est prit chez un doc agréé par ce même gouvernement de kangourous, à Phuket. Epris d’apnée, je décale mon arrivée sur la presqu’île, et je dois finalement arriver trois heures avant le rendez-vous. Je suis conscient des retards, mais je me dis que sur un trajet de dix heures (bateau plus bus), trois heures devraient suffire.
Trop optimiste bien sûr. Après quatre heures (oui quatre) à tourner dans cette non charmante bourgade de Surat Thani, passant de tuktuk en bus, de resto en agences, à être prit pour des jambons par tous les locaux qui gèrent l’acheminement des riches touristes que nous sommes, on commence à péter un plomb avec quelques autres collègues d’infortunes. Si seulement ils étaient honnêtes à nous dire la véritable heure d’arrivée (car ils le savent très bien depuis toutes ces années), à ne pas se décharger sur les autres sans arrêt. Bon, conscient que je vais rater le rendez-vous de deux bonnes heures, j’engage la conversation avec ma vitre de bus. Celle-ci, de qualité chinoise je présume, folle de mon avant-bras, se fissure à ma première touche. C’est gagné !
Les autres du bus ont beau me remercier, « je rêvais de faire ça bla bla bla », c’est moi qui me retrouve au poste avec une amende de 500 € sur la table. Quelle blague, pas moyen, ça en vaut 100 voire 150 tout au plus main d’œuvre comprise. L’ambassade ne m’aide pas trop tout comme les sites internet. Si seulement Carglass pouvait nous mettre les prix des vitres au lieu de nous saouler avec ses slogans débiles !
Conscient de ma faute, je leur explique très calmement (je suis redescendu dans les tours) que je veux payer le vrai prix, voire un plus pour la gêne occasionnée. Si je reste très diplomate avec mes compères policiers pacifiques, mon meilleur (ou pas) français reprend très vite le dessus dès que je sens une certaine animosité sertie d’extrême mauvaise foi à mon égard, tel Lambert Wilson dans Matrix, puissance dix. Quel plaisir d’évacuer la pression à tout va devant je ne sais combien de flics qui ne comprennent rien à mes dires. Bien que je les soupçonne d’avoir deviné la tenue de certaines de mes remarques.
Ok j’ai fait une boulette, qui ne se serait jamais produite dans un bus avec une vraie vitre soit dit en passant, je vais payer mais qu’on arrête de me mentir à tout va, à me menacer de prison, de procès d’une semaine (!), de je ne sais quoi c’est ridicule. Une parodie de police/justice où j’ai pour mission première de remplir les poches d’un peu tout le monde, du premier flic rencontré au grand (par les médailles, pas par la taille) dans son bureau et à la compagnie d’autobus.
Après quelques heures, je descends à 220 €. J’ai la haine mais y’a pas mort d’homme.
Allez ce n’est pas grave, quelques jours après je trouve ça presque marrant.
La Thaïlande pour les touristes. Un séjour plein.

Plage de Sairee, à Koh Tao. Comme dans tous les pays, les gens jouent au foot.

Le frelon d’or de la semaine. D’origine plus terrien que marin, j’ai découvert ce nouveau monde avec enthousiasme… à quand le réchauffement climatique afin que la Méditerranée arrive aux portes de Lyon, qu’on se fasse de bonnes sessions plongées ? Hein Manu ?!
La pompe à vélo de la semaine. Ce séjour au poste. Ce qui me déçoit surtout c’est que ce sont les seuls thaïs que j’ai vraiment rencontré. Sur les îles, je « conversais » avec des birmans, eux-mêmes sous-fifres des locaux. Le pays étant devenu une industrie à touristes, les relations ont évolué avec et l’on n’est plus du tout en Thaïlande mais à Touristland, et il faut donc casquer. Il y a assurément des locaux sympas, réellement accueillants mais je n’ai pas eu le plaisir d’en croiser beaucoup. Ma foi, en investissant le pays de la sorte les occidentaux l’ont cherché. On a trouvé !
Le fun de la semaine. Avec Greg l’instructeur de plongée en bouteille nous voila à dix douze mètres de fond, à observer les poissons et coraux tous plus fluo les uns que les autres. Magique. Puis au détour d’un rocher, que ne vois-je pas, une superbe meule type Vespa posée sur le sol. Intrigué par ce spécimen tout à fait original dans ces profondeurs, je me positionne et l’enfourche à la vitesse d’un astronaute en apesanteur. Je sens qu’en lançant les gaz je vais partir à toute berzingue, mais au moment où je m’apprête à poser la main gauche sur le guidon, une saleté de poisson me la niaque ! T’as raison je n’ai pas demandé la permission, tcho.

Benjo

PS Musical de Benjo : Around the world, de Daft Punk
PS Musical de Charpi : Turn the page, de Metallica

20 avr. 2013


Quoi qu’on en dise…

La fin approche, plus qu’une vingtaine de jours avant le retour en France. Dernière destination : les régions de Nanning et Hong Kong où une nouvelle épidémie de grippe aviaire est dans les tuyaux. L’affaire des 16000 porcs morts retrouvés dans un des fleuves de Shanghai a relancé la machine. La Chine est sous pression des autorités sanitaires internationales. Cette fin de voyage s’annonce délicieuse.
Bref, aparté mis de cote le temps d’un post sur les vietnamiens et leurs homologues du beau sexe.
Je suis arrivé au Vietnam avec pas mal d’a priori. Beaucoup de gens étaient déçus de l’ambiance générale ici : les vietnamiens ne sont pas sympas ! Point trait ça tombe comme ça, sans prévenir. J’ai rencontré que deux personnes qui rééquilibraient ce tableau peu flatteur : Benjo et un autre frenchy qui avait traversé le Vietnam en moto. Des personnes peu fiables vous vous en doutez ^^.
Donc je traverse les montagnes entre le Laos et le Vietnam et je rentre dans le pays de l’inimitié.
Je vais vous dire une chose : les vietnamiens sont super sympas. Certes ils sont énervants sur plein de points. En fait ils ressemblent pour beaucoup à l’idée que les étrangers se font des français. C’est mon impression. Voici un petit bilan comportemental made in Vietnam.

Parés au décollage ?

HOSPITALITE
Comme dans la plupart des pays que l’on a traversé, les vietnamiens sont heureux d’accueillir les étrangers.
Mes premiers jours je les ai passe à Ninh Binh et le proprio de mon hôtel a tout fait pour me simplifier la vie. Quand je lui ai dit, j’ai un budget serré, il m’a offert une chambre sur le toit rien que pour moi. Prix ? 2 dollars. Mon séjour dans la région de Tam Coc a été grandement simplifié grâce à lui et ses potes, ses cousins. Tu veux aller là ? Pas de problème. Tu veux une motobike ? Une manuelle ? Pas de problème. Le cœur, quoi.
A Hanoi, royal !! Deux Couchsurfing absolument géniaux. Certes je ne logeais pas dans le vieux centre. Mais le fait de vivre en banlieue tu goutes au Vietnam vitesse grand V. Pas de touristes ici donc quand tu marches dans la rue, tout le monde te regarde mais passé la surprise, tu refuses les invitations à boire du thé, fumer la pipe, jouer aux échecs chinois. Et mes deux hôtes ont été d’une gentillesse rare rendant mes excursions, montagneuses et maritimes, tellement plus simples. Des tours en motobikes, des repas dans des Com Pho locaux… bref le bonheur.
A Bai Tu Long, au nord de Halong Bay, dans le village de Cai Rong, j’ai joué au football avec les gamins du coin. Ils étaient ravis, les parents étaient fous de voir un “blanc” dans ce trou perdu. Plus tard sur l’île de Quan Lan, je me suis arrêté par hasard au bureau de la sécurité maritime pour m’abriter de la pluie. Les militaires présents m’ont payé le coup et apprit à jouer aux échecs chinois. Le soir j’ai dîné avec eux.

Bon ap' made in Vietnam

REPAS
Alors je ne connais que la partie nord du Vietnam, beaucoup plus authentique (d’après toutes mes rencontres et discussions avec des gens venus du sud ou des expat’ vivant ici).
C’est vrai que partager le repas avec des vietnamiens peut surprendre. J’ai l’expérience de la Chine donc je n’ai pas été très choque.
Ils mangent vite et tout le temps. Ce n’est pas vraiment un plaisir de manger plus une nécessité. Ils mangent mal, les sols des resto locaux sont jonches de déchets. Ça se racle la gorge, ça crache, se pouille le nez ou les oreilles entre deux noodles soups (certains se laissent pousser l’ongle du petit doigt pour rendre l’opération plus simple). Bref ce n’est pas super emballant.  Mais la tradition est au partage encore une fois. On commande toute une série de plats et on picore tout en décornant. Impossible d’échapper au riz ou aux plats d’herbes. Si tu commandes pas ca, on va te regarder bizarre.
Le soir après le taf, particulièrement à Hanoi, tout le monde se retrouve dans les rues, costards, vintage, déglingos, zicos, étudiants, tous se côtoient autour de la Bia Hanoi cette bière sans conservateur tirée à la pression. La bière la moins chère du monde : 12 cents. Ici la bière est très chère quand elle vaut 1 dollar !!
Le lendemain c’est le weekend et il fait lourd, chaud. Une petite sucrerie. Rendez-vous ai donné chez le glacier le plus populaire à Hanoi. Des glaces maisons pour trois fois rien. Pas de chaises, pas de tables juste les bars de vente et tout le monde se pose sur sa motobike. J’en ai fait ma cantine-dessert. Superbe ambiance.
Enervant tout de même quand tu partages un café avec eux et qu’ils passent deux heures à le boire. Il est déjà servi froid et tu ne comprends pas. Ici ils le boivent avec du lait. Parfois c’est impossible d’avoir un café noir. Ils ne veulent pas. Tu leur expliques qu’il y a juste à ne pas mettre de lait. Rien à faire.
Parfois c’est toi qui complique les choses comme ce diner avec les militaires où ils étaient ravis d’ouvrir le bal avec les “fameux” poussins de un jour. C’est comme bouffer un fœtus, putain c’est dagalasse !!

Casque ou pas, masque ou pas... le bordel organisé d'Hanoi

MOTOBIKE
Plus qu’ailleurs les vietnamiens sont fiers de posséder une motobike. Ici c’est plus que culturel, c’est vital. C’est un truc de fou. Je pourrais faire un post juste là-dessus. Ils ont une relation amoureuse avec leurs bolides. Pour un étranger c’est très fun de voir ça mais ca cristallise aussi beaucoup de tensions. Revue des commandements essentiels.

0-     Je porterai mon casque (rien que le nom m’amuse) dans les commerces, à table parfois. Quand je dis casque encore une fois c’est plus un couvre-chef qu’autre chose. Certains portent une casquette ou un casque militaire très sixties.

1-     J’aurais trois, quatre personnes sur la motobike c’est normal. Toujours l’enfant devant soi tenant le guidon. Toujours.

2-     Jamais je n’utiliserai mon clignotant ou alors je l’enclencherai deux ou trois cents mètres avant l’intersection et le laisserai une fois que la manœuvre sera effectuée créant le trouble dans l’esprit de mes poursuivants

3-     Je stopperai au milieu du carrefour sans aucune autre raison que de taper la discute avec une autre motobike. J’ignorerai complètement le concert de klaxons que je déclencherai. Normal.

Vespasienne mobiles

4-     Je conduirai en contresens. Quand tu pilotes, et que tu arrives à une intersection, ne regarde jamais à gauche. Vérifie bien à droite, y’aura toujours un gars qui t’arrivera droit dessus et t’évitera Dieu sait comment à la dernière seconde.

5-     Je conduirai en même temps que je gérerai mes sms et mon compte facebook.

6-     J’utiliserai mon living room comme aire de stationnement. Je me rappelle, une de mes couchsurfeuses utilisant son salon pour garer la sienne. Motobike, le meilleur ami de l’Homme vietnamien. Pratique courante.

7-     En tant que mototaxi, je pratiquerai l’ensemble de mes activités diurnes (lecture de journal, repas, échecs chinois, the et café …) et nocturnes (pipe, repos …) sur le siège de ma bécane. Les mototaxi sont insupportables. Ils t’appellent en permanence, les prix sont bien sur triple pour les touristes. Mais ils ont ce côté super fun. Forts, très forts.

8-     C’est vert, je peux passer. C’est orange, je peux passer. C’est rouge… je peux encore passer. Il y a ce curieux panneau numérique à une intersection (Hanoi). Ils indiquent les taux de pollution et le nombre d’accidents. En une semaine c’est toujours reste à zéro. Les quatre cartons que j’ai vu au fil des mes promenades devaient être les produits de mon imagination.

9-     Tu seras sourd aux klaxons. Heureusement qu’il n’y a pas d’armurerie ici. Je pense que j’aurais acquis une arme d’assaut juste histoire de dézinguer quelques uns de ces purs barjos qui utilisent leurs klaxons comme un plaisir sadique. Je suis devenu fou il y a quelques jours. Je pensais même qu’ils attendaient d’être à ma hauteur d’oreille pour me la défoncer. Parfois je craquais : “Enfoiré, ta gueule pov’con” C’est vrai merde quand la route est vide, que tu marches tranquille et qu’il te klaxonne en pleine gueule. Tu ne comprends pas quoi. Tu ne vas pas te jeter sous ses roues, c’est bon tu l’a vus.

10-Tu auras des conversations avec d’autres motobikes pendant que tu conduis et tu ignoreras les klaxons des voitures situées derrière toi et qui veulent passer.

11-Tu transporteras meubles, frigo, écran large, métaux, animaux, en fait tout et en grande quantité.

12-Tu porteras un masque médical pour te protéger de la pollution. Très efficace.

13-Tu couvriras l’ensemble de ton corps pour échapper aux rayons du soleil et ainsi garder une peau blanche.

14-Ne jamais laisser un étranger utiliser ton bolide sans ta permission même si le gars s’appelle Dani Pedrosa ou Valentino Rossi. Tu ne les connais pas, tu ne sais pas d’ou ils viennent, ce qu’ils veulent faire dans la vie… Bref personne ne touche mon bolide sous peine de se prendre deux chopsticks dans les narines.

15-Tu porteras la marque de ta motobike (de ton pot d’échappement) sur la jambe en signe d’affection. Ici on le nomme le “Saigon kiss”.

Même (surtout ?) à la campagne, la motobike est reine

La suite prochainement …

NDLR : je vous conseille de lire ou relire la très instractive tribune de Pierro lors de son voyage à Hanoi "De la stratégie de l'évitement, essai sur la conduite vietnamienne"

Le frelon d’or : Mes deux hôtes à Hanoi. Un grand merci à Nga et Huong.
La pompe à vélo : l’insupportable utilisation des klaxons. Tu as des envies de meurtres. Je crois que ca joue beaucoup sur ton humeur et le rapport que tu as avec les vietnamiens. Soyez prêts.
Le fun de la semaine : Ça y est, je l’ai trouvé. Le premier mototaxi femme de toute l’Asie du sud-est. Je marchais en direction de la gare quand j’ai entendu sa voix haut perchée. Dommage, j’étais déjà arrivé à destination sinon tu penses bien que j’aurais fait un tour avec elle.

Charpi

PS Musical de Charpipo : Blue in green, de Miles Davis
PS Musical de Benjo : Fade into you, de Mazzy Star
PS litteraire de Charpipo : je vous recommande la lecture de l’autobiographie de Clapton. Très touchante.

13 avr. 2013


Bonzes et bonzesses

Je finissais l’article précédent ainsi : en Birmanie, Aung San Suu Kyi est vénérée de partout tout à la fois comme la mère et l’espoir de la nation Myanmar. Et à côté de ça 88% du pays est bouddhiste, une religion où la femme doit dans un premier temps se réincarner en homme pour accéder au nirvana… Autre paradoxe, le gouvernement qui se réclame du bouddhisme mais qui tue ses moines qui manifestent dans le calme. Mais de la part d’une junte militaire, c’est peu surprenant, et on imagine que le bouddhisme est avant tout une manière de s’octroyer les faveurs du clergé.
La constitution autorise la liberté de culte mais en réalité les bouddhistes ont un statut privilégié. Il y a en plus des bouddhistes, quelques chrétiens, musulmans, hindous, animistes… et presque tous respectent encore les vieilles croyances animistes et le culte des esprits tutélaires, les nat. De plus, la superstition est très présente, la consultation d’astrologue faisant partie intégrante des traditions, que l’on soit simple citoyen ou au sommet de l’Etat.
Originaire du Népal, le futur Bouddha naquit au VIème siècle av. J.C. Tenant tête au démon Mara, assis pendant quatre jours sous un figuier dans la position du lotus, il atteint l’Eveil et réussi à se libérer de toute souffrance. Il enseignera dès lors la loi du Karma, selon laquelle toute action sera récompensée ou punie (selon si elle est bonne ou mauvaise) dans une future réincarnation.

Allez on prend des notes, je vais pas répéter

L’enseignement vise à se défaire de trois caractéristiques existentielles de tout un chacun : la dukkha (souffrance due à l’insatisfaction), l’anicca (la non-permanence, rien n’est figé) et l’anatta (l’impersonnalité, l’interdépendance). Le cycle des renaissances permet au bouddhiste de chasser petit à petit l’ignorance, le désir, les passions. Ce n’est qu’en atteignant cet état de sagesse et d’absence de désir qu’il peut atteindre le bonheur. Pour l’accompagner sur ce chemin, il pratique la méditation. Ainsi les bouddhistes cherchent à atteindre le Nirvana, un état de bonheur ou l’Homme s’est défait de ses passions et en a fini avec le cycle des renaissances. Bouddha a enseigné « Quatre nobles vérités » :
-          Notre existence est faite de souffrances
-          Les causes de ces souffrances
-          La cessation ou l’extinction de ces souffrances
-          Les solutions pour arrêter ces souffrances, l’octuple sentier
Cet octuple sentier comprend : la pensée juste, la compréhension juste, la parole juste, l’action juste, le mode de vie juste, l’effort juste, l’attention juste et la concentration juste. Et l’ordre juste ? Ah, non ça c’était Ségolène en 2007. Désolé.
Au Myanmar, on pratique essentiellement le bouddhisme theravada, ou bouddhisme du Petit Véhicule (et non le mahayana, Grand Véhicule). Ce bouddhisme (présent également au Sri Lanka, Thaïlande, Cambodge, Laos) diffère de toutes les grandes religions dans le sens où il n’est pas centré autour d’un ou plusieurs Dieux. Il n’y a pas d’intermédiaire entre l’Homme et son salut, celui-ci peut-être trouvé seul, par des actes individuels, la contemplation et la discipline (qui n’est pas de l’ascétisme).
Le bouddhisme mahayana (Chine, Tibet, Mongolie, Japon, Corée) promeut plus l’action, la compassion, le salut d’une personne passant par le salut de toute l’humanité. Il semblerait que le bouddhisme birman tende petit à petit à adopter quelques préceptes mahayana, en étant un peu plus dans l’action.
C’est jusqu’ici le pays où je rencontre le plus de moines et où le bouddhisme fait partie intégrante du quotidien. Il faut peu de temps pour que les yeux croisent une pagode ou un moine, une nonne. Et dans toutes les maisons, toutes les voitures, les bus, les magasins, il y a toujours une place pour Bouddha, avec quelques offrandes déposées devant sa représentation (pomme, Coca…). D’ailleurs ici les gens donnent énormément, de 10 à 30 % de leurs revenus parait-il. Dans tous les monuments religieux il y a des « donation box » de partout, le plus souvent remplies par des locaux. Cela aide à la restauration des monuments mais pour eux ces offrandes, comme l’aumône matinale, sont également le moyen de gagner une vie meilleure, c’est une bonne action (ça rappelle un peu des vieilles pratiques chrétiennes tout ça…).
Tout homme bouddhiste de Birmanie doit passer au moins une semaine dans un monastère et il peut aller et venir en tant que moine tout au long de sa vie, comme bon lui chante. Pour beaucoup de familles pauvres, l’éducation bouddhiste est le seul moyen de scolariser les enfants, cela expliquant aussi le grand succès des écoles religieuses. Car au Myanmar l’école est payante, même pour les tout petits… « I don’t like this governement » me disait Kima, l’adolescente de Dana Township à Yangon, « parce que mes parents n’ont pu me payer que quatre ans d’école ». Mais démerdarde, la petite s’en sortait plutôt bien. Raison de plus pour soutenir Aung San Suu Kyi, même pour cette petite musulmane.

Aumône dans un village Palaung

Je le disais en intro, les femmes n’ont pas la meilleure place ici. Comme de partout, les racines de cet état de fait proviennent de la doctrine religieuse, ici le bouddhisme, qui présente les femmes comme impures, à part la Dame bien sûr. Les nonnes, tout de roses vêtues, suivent un bouddhisme moins « prestigieux » car elles ne suivent que dix préceptes, comme pour les novices… pourtant les birmans les appellent souvent les thilashin, les détentrices de la morale.
A les croiser dans la rue ou à discuter avec elles, les relations sont presque « normales », surtout avec la nouvelle génération qui s’affranchit des vieilles traditions. Dans les lieux touristiques, elles agissent d’égal à égal avec les hommes mêmes si c’est toujours un homme qui semble être le boss. Dans les campagnes, elles s’occupent de la maison, de la famille et à côté de ça travaillent dans les champs, au marché… elles n’arrêtent pas ! Parfois l’homme lui ne fait pas grande chose, si ce n’est dormir, discuter ou boire avec ses amis. Notre guide Mr Bean nous le disait plus ou moins en rigolant mais il est vrai qu’on pouvait constater cela de temps en temps : les femmes en train de bosser et les gars qui somnolaient sous un arbre. Lui bosse ! Il veut payer l’école et des études à ses trois enfants donc a deux travails, guide et maraicher. Et apparemment c’est sa femme qui fait la loi de retour à la maison^^. Mais j’ai souvent pu constater, quand-même, que les gars bossaient ardemment et pas dans les meilleures conditions de travail, bien qu’il soit écrit « safety first » de partout. Une bonne blague.

Mais les filles aussi savent faire l'aumône !

Et si on continue dans les discriminations, parlons des homosexuels. Invité à un anniv d’un occidental, on discutait avec Joseph, jeune birman bilingue anglais (et ouvert d’esprit) qui n’arrivait pas à concevoir l’homosexualité. Il était d’accord pour dire que les gens étaient libres de choisir leur mode de vie mais… Mixé avec les conflits actuels avec les musulmans dans le nord du pays, il dit que le violeur musulman (dont je parlais au post précédent) se réincarnera en homo (ou l’inverse je ne sais plus trop mais au point où on en est). Le musulman et le gay étant donc les pires… des races. Pas très bouddhiste tout ça me semble-t-il. Et quand je lui demandais « et toi avec tes deux copines à la fois, comment tu l’envisage ta future réincarnation ? » Piégé ahah !! Un rire gêné et il esquive le sujet… eh oui mon Jojo.
J’avais une image très positive du bouddhisme, une religion prônant la paix, l’amour entre les peuples… comme toutes les religions ! De plus en Occident, on a l’image du Dalaï Lama et des tibétains oppressés par le gouvernement chinois. Une religion martyre en somme. Oui j’ai ressenti un accueil bien particulier de la part de ces gens, mais comme toutes les autres religions il y a des extrémistes, des crétins finis, des moines avec des poignards sous la robe… Pas un culte pour rattraper l’autre.

Mais en Birmanie, je n’ai pas été que sérieux à enquêter et potasser, j’ai aussi parcouru une petite partie de ce grand pays, plus grand que la France. Seulement présent pour une vingtaine de jours, j’ai essentiellement suivi les circuits à touristes. Et le pays se débrouille déjà très bien dans la gestion des foreigners, en fait on se croirait dans un autre pays d’Asie du Sud-est quand on se promène dans les sites touristiques. Presque les mêmes infrastructures, les mêmes astuces, les mêmes arnaques, et les mêmes relations humaines.
De ces trois semaines j’en ai passé une à Yangon, où j’ai croisé pour quelques minutes ou quelques heures des dizaines de birmans dont les gamins de Dala ; Je suis allé à Bagan, capitale au temps du moyen-âge, où trônent encore plus de 2200 pagodes qui se perdent dans la poussière et les palmiers au détour d’un bras de l’immense fleuve Irrawady, j’y ai rencontré Aung Tou le « peintre sur sable » et Pyu Pyu la vendeuse de longyi, l’habit traditionnel birman ; A Mandalay, Aung Sisan nous a fait découvrir la ville et ses faubourgs cachés ; à Hsipaw Mr Bean (car il vend des beans !!) nous a bien fait marrer, tout en me parlant sérieusement de son pays ; au Lac Inle, Atta nous a emmené dans son immense maison sur pilotis puis sur le lac pour profiter d’un superbe coucher du soleil… (top cinq des sunset ?).
Les rencontres avec les locaux sont quotidiennes, parfois faussées par l’attrait pécuniaire, et parfois sous le signe de la méfiance envers ces blancs, mais la plupart du temps elles sont simples voire enrichissantes lorsqu’il est possible d’échanger. Personnellement j’ai préféré les grandes villes, Mandalay et surtout Yangon. Des villes d’un autre temps où il règne une atmosphère vraiment particulière et où il fait bon s’égarer.
Bon allez, j’me thaÏ.

Ciao !

 Le frelon d’or : Parcourir de nouveau Yangon, cette ville bloquée au milieu voire au début du XXème. Et particulièrement le retour à Dala Township avec la jeune Kima, croisée lors de mon premier passage à Yangon. En compagnie de l’hollandaise Misha, un voyage dans un autre monde, qui commence par le ferry puis à pied ou à bord d’un trishaw, le tuktuk local, un vélo avec un side-car ou un passager est dans le sens de la marche quand l’autre est tourné vers l’arrière.
La pompe à vélo : Malheureusement j’imagine déjà les difficultés de gestion du pays une fois la démocratie vraiment en place, et les espoirs déçus… mais ce ne pourra qu’être mieux que ces cinquante dernières années.
Le fun : la soirée en boite avec Bastien et Fabien, encore une expérience… et le petit tour au festival Hip-hop avec toute la classe wesh wesh made in Myanmar. Excellent !

Benjo

PS Musical de Benjo : Olhos Molhados, de Bonga
PS Musical de Charpi : Jazz we’ve got, de Tribe Called Quest

8 avr. 2013

Non à la privatisation de la nature !

Non à la privatisation tout court ? On peut s'asseoir autour d'une table et en discuter pendant des heures. Il faut juste être flexible. C’est ce que l'on nous demande : de la flexibilité ! Mais je crois que pour le domaine économique, la pensée unique domine et empêche tout autre raisonnement d'émerger.
Je suis à Sapa dans le nord du Vietnam. Je suis venu ici pour une seule chose : grimper le Fansipan, le plus haut sommet d’Asie du sud-est (sans compter la Birmanie ni la Malaisie NDLR^^). Situé à 3143m dans les Alpes Tonkinoises. Autant vous dire tout de suite qu'il faut une certaine envie pour venir à Sapa. Quitte à m'attirer les foudres de certains, Sapa c'est Disneyland sans le côté fun. Cette station climatique est devenue en quelques années une des traductions concrètes de ce que je nomme la privatisation de la nature. Des que vous arrivez, très tôt le matin, les chauffeurs de bus et motobikes vous sautent dessus, vous tirent par le bras. Ils vous annoncent des prix déments pour couvrir les 35 km de Lao Cai à Sapa.
Puis vous arrivez à Sapa. Une succession de resto, de magasins d'art traditionnel (vous vous en doutez, du fait main) et des boutiques North face à la chaine à des prix imbattables, en-dessous c’est gratuit. Ils vont même jusqu'a copier les certificats d'authenticité. La Chine n’est pas loin ça se sent. Donc beaucoup de touristes à Sapa. Dans mon cas principalement des français et des israéliens. On vient à Sapa pour trekker et faire du homestay à la rencontre des Hmong et des Dao.
J'ai passé ma première journée à chercher un moyen pour grimper seul le Fansipan et en une journée. J'avais checké la météo et le temps était magnifique pour deux jours.
J'ai loué une motobike afin de me rendre à l'entrée du parc national. A peine descendu, les gardiens me demandent où est mon guide, mon ticket d'entrée, mes permissions. HEEEEEEE on se détend. Je suis venu justement pour prendre des infos. On m'explique que je dois passer par une agence, avoir un guide, que c’est dangereux, impossible en une journée. Pourtant le panneau posé à l'entrée indiquant les régulations pour les séjours dans le parc ne spécifie en rien tout ça. Bref on ne veut pas me donner d’infos. Je reste calme et souriant, j'ai appris ça ici. A force d'insister on me dit qu'il faut que j'achète mon ticket d'entrée à Sapa. Je redescends dans la vallée, j'arrive au centre d’information touristique. Oui, oui vous lisez bien. Et pourtant même discours et en prime nerveux le Gabert, du genre tu me fais chier je suis entrain de pianoter sur mon Ipad et j'ai autre chose à foutre que renseigner (ce pour quoi je suis payé soi dit en passant). Aucune info donc, à part que tu dois payer et si t'es pas content tu te casses. Ok !!

On the top !

Je tourne en ville, demande à droite et à gauche. Un guide Hmong fini par me dire qu'il y a un centre de conservation de la nature qui vend les tickets et les autorisations nécessaires. Je m'y rends. Plus loin sur la route, je me fais arrêter par une barrière. Je dois payer un droit d'entrée dans un village Hmong. Ici la plupart des villages ont posé des taxes. Uniquement pour les touristes, bien sur. J'explique ma situation, le gardien me laisse passer sans payer, le centre étant juste derrière la barrière. Le complot continu, centre fermé. Désespéré je rentre à l'hôtel. Je ne veux pas gâcher ces deux jours de temps magnifique. Je commence à accepter le fait que je vais devoir passer par un guide ou une agence. Je fais le tour des operateurs avec des propositions toutes plus farfelues les unes que les autres : « Pour une journée, seul ? Ok 100 dollars ! », « Une journée ? Ah non on fait pas, juste des package de deux, trois ou quatre jours à 50 dollars par jour. »
Pourquoi c’est aussi cher ? « Mais mon cher monsieur, les frais de fonctionnement, les autorisations, la masse salariale (les guides et les porteurs : mais j'en ai pas besoin, merde !!) et surtout la protection de la nature, l'entretien du parc. » Bon ok. Je finis par me dire que je suis venu grimper et que demain est la seule journée de temps clair prévu pour la semaine. Je rentre dans une ultime agence. Ils me proposent 35 dollars la journée pour le package deux jours. Départ demain avec un groupe de trois autres personnes. Allez je prends. Putain payer pour marcher et grimper une montagne. Droit commun. Pour moi c'est incompréhensible. Surtout que le coup des guides et des agences, ce n'est que pour les touristes. Pour les vietnamiens, l'accès au ticket d'entrée est étrangement simplifie.
Imaginez la même chose en France et imaginez si un noir-africain se présentait à l'entrée du Mercantour et qu'il reçoive en pleine gueule ces conneries de requêtes.
Le lendemain, le départ était prévu pour neuf heures. Pourquoi si tard ? Finalement on ne commence la marche qu'à partir de 10h du matin. Aux heures les plus chaudes. Ça sent le faisan ! Des pauses toutes les dix minutes. On met quasiment deux heures pour arriver au premier camp situe à 2200 m. 300 m de dénivelé pas trop compliqué et à la vitesse d'un pépé en déambulateur. On s'arrête pour le déjeuner. Un déjeuner typiquement local qui mérite l'argent payé : sandwich avec concombre, tomate, porc en boite, Vache qui rit et un fruit vietnamiem, une pomme du Chili. Ok je sens qu'il va falloir prendre les devants. J'expédie Le Repas et demande au guide si je peux marcher à mon rythme et faire le sommet aujourd'hui. Le guide Hmong est un jeune du coin et très sympa il me répond : Oui c'est possible. Encore trois heures avant le sommet. C'est ardu mais faisable. Vous vous souvenez : impossible à faire en une journée, trop long, besoin d'un guide... et toutes ces conneries. J'entends un guide me dire tout le contraire, une fois l'argent déposé sur la table bien sur.
Je reste concentré sur mon objectif. Le temps est splendide, mars est la période d'éclosion des fleurs sauvages, les couleurs pointent leur nez un peu partout sur les pentes. Le sentier est très facile à suivre, il est jonché de déchets. J'entends encore résonner les mots des mecs des agences : surtout l'entretien du parc. Et les régulations pour les touristes, l'une d'elles dit "tout le monde est responsable du maintien de la propreté des lieux, pas de cueillette autorisée, etc etc." Pendant ces longs mois, toutes les fois que j'ai pu marcher dans des parcs, les mêmes avertissements étaient stipulés. Mais je n’ai jamais vu d’occidentaux jeter leur merde n'importe où. Les locaux oui et allégrement. Faudrait les prévenir. Ah c'est déjà fait ?! Toutes les régulations sont en Vietnamien. Ah bon ? Mais à quoi sert l'éducation ? On s'en fout.

De toute beauté

Je continu seul, sans le groupe. Une heure et demi plus tard, en ayant bien bourriné j'arrive au deuxième camp à deux mille huit cents mètres. Et là c'est catastrophique. DAGALASSE, des refuges en bambous, des bâches de plastique en guise de toit à moitié déchirées par les vents. Des déchets partout comme au premier camp. Et puis aussi un magasin où l'on vend de l'eau, des boissons sucrées et autres éléments nutritifs locaux à des prix hallucinants. Dix fois le prix, et ce sans sourciller. Tout est tenu par des Hmong, ces peuplades locales si pures d'esprit, à la vie si simple. En clair que l'économie capitaliste a fait basculer du côté obscur.
Je m'arrête une dizaine de minutes plus haut, histoire de recharger les batteries et d'attaquer la dernière tranche, encore 350 m avant le sommet. Et putain, c'est pas le plus haut sommet du monde mais c'est une marche dure, vraiment. Ça descend, ca monte, ca redescend. Tu passes quasiment une heure à jouer au yoyo à deux mille neuf cents. Ça scie les pattes. Sur le chemin je rencontre un groupe parti en milieu de matinée du deuxième camp. Un des deux guides Hmong est étonne de me voir seul. Sans même me dire bonjour, il enchaine légèrement agressif pour pas dire complètement antipathique :
-          " pas de guide, tu es seul, c'est interdit et c'est dangereux".
-          "Mon guide est plus bas, il m'a donné son accord pour grimper seul".
-          " Tu es sur ? C'est dangereux de partir maintenant pour le sommet ? (il est 14h, le sommet est à une heure de marche NDLR). En tout cas c'est bien de t'avoir vu avant la nuit, tu fais comme tu veux, c'est toi qui voit...
Au fond de moi, je me dis « c'est quoi ces insinuations. On est marcheurs mec, on aime la montagne, prendre du plaisir et au lieu de m'encourager tu me sors des merdes pareils. Si c'est si dangereux, pourquoi t'es là trou du cul ?! Regarde mon sac ducon, y’a du matos dedans. Je connais la montagne et je la respecte. Si elle veut me prendre et bien qu'elle me prenne. Apres tout mourir ici me va comme un gant plutôt qu'écrasé par une motobike au milieu d'un carrefour de Hanoi. »
Je n'ai bien entendu pas répondu comme ca. Je me suis contenté de sourire en clamant que j'allais même dormir au sommet pour voir le levant. Le mec n'avait aucun humour, il m'a juste dit que c'était illégal.
Bref j'ai tracé jusqu'au sommet après un rude chemin. Et là c'est du pur bonheur. Quand tu touches l'horizon. Une vue dingue. Une panoramique sur l'ensemble des vallées et montagnes alentours. On distingue Sapa, les rizières qui commencent à reverdir, la brume enveloppe certaines pentes donnant au lieu un aspect mystique. Le vent souffle. Je suis avec mes Dieux ici. C'est plein d'énergie vitale. On oublie tout, on fait le vide. Je partage ce moment avec un photographe du coin qui campe depuis trois jours 50 m plus bas. C'est illégal de camper au sommet... Etonnant !!
Une heure à profiter du temps clair, ça meule mais c'est tellement transcendant. Je redescends avec une jeune guide Hmong qui s'occupait de deux autrichiens. Elle a passé une partie du chemin à essayer de me vendre des trucs en ponctuant toutes ces phrases par "one dollar". Elle blaguait la plupart du temps. Mais l'esprit reflète bien ce qu'est devenu Sapa : une zone marchande et de la pire des manières.
Une nuit à deux mille huit. Enfin une nuit en refuge. Je n'ai pas dormi grand chose entre le concert de ronflements et les entrées et sorties discrètes de ceux qui voulaient se vider la buche. Bref je m'en foutais pour une fois j'avais fait le job avant.
Le matin comme prévu, le temps s'est dégradé. Tout était bouché. Je suis quand même reparti une deuxième fois au sommet avec le groupe cette fois. Les guides m'ont prit pour un cinglé. Mais l'ambiance était bien différente. La brume partout, le soleil perçait parfois. C'était cool. Au sommet, il faisait nettement plus froid, on voyait pas grand chose. On est redescendu jusqu'au second camp puis le premier. On stoppe les machines pour un déjeuner typiquement local deuxième édition avec de l'ananas cette fois. WAAAAOUUUUUUHHHHH. Puis le guide nous annonce qu'il n'y a plus d'eau. Putain oh les mecs vous exagérez ! Vous nous dites qu'il y a des porteurs, qu'ils s'occupent de tout, qu'on a besoin de rien prendre mais finalement si on n’avait pas pris notre biz' pour être autonome deux jours on avait quasi que dalle. Voyant la fronde arrivée, le guide, dont ce n’est pas sa faute entre nous, se met à faire bouillir de l'eau. Cool. Encore six heures de marche sans eau ça aurait été un peu rude.
Le guide nous a proposé de passer par un autre chemin. Et là c’était splendide. Passages au milieu des rizières, des villages typiques, vraiment typiques ou les locaux te jettent des regards mi-menaçants mi-curieux. Ils baissent la tête, ne disent rien. Ils sont très enjoués avec notre guide mais avec nous se ferment complètement. Moi je m'en fous, je préfère ça. Le coup du homestay à la découverte de la faune locale très peu pour moi et quand je vois tous ces touristes qui se prennent pour des docteurs es ethnologie en passant une nuit dans un village. Ça me fait doucement rire. Marcher et profiter des lieux ok mais se mettre à photographier au ras du nez une hmomg en train de filer la soie ou de bêcher son jardin. Imagine un étranger faire ça avec toi. Qu'on leur foute la paix. Le simple fait de traverser le village, tu comprends pas mal de choses : économie rizicole de survie, école et maisons sommaire. Tout le monde travaille aux champs.

Fais comme maman, mange ta soupe petit jedi

Et puis, et puis malheureusement un peu plus loin dans la vallée à l'approche de Cat Cat, un de ces villages Hmong pourri par le fric, un magasin improvise North face émerge au milieu de la brume. Hé merde ! N'empêche que le chemin du retour était magnifique, j'étais rincé mais la compagnie des trois collègues de marche donnait l'énergie nécessaire. Ils ont passé une nuit chez l'habitant (sans le voir d'après leurs dires ^^). Le guide m'a remonté jusqu'à Sapa. A peine arrivé que le folklore de quémandage Hmong et Dao recommence. Partout en ville tu peux voir des locaux essayer de te vendre n'importe quoi à n'importe quel prix. La plupart sont des femmes, des enfants parfois. Ils parlent tous étonnement anglais. Ils ne te lâchent pas, si tu rentres dans un magasin, ils attendent à la sortie. Idem si tu déjeunes. Souvent tu leur dis « j'en ai pas besoin » « Pourquoi ? » te répondent-elles. Putain il faut justifier des non besoins ?! C'est quoi ce bordel. T'essayes de rester sympa et de glisser un poli maybe later mais elles ne comprennent toujours pas. Bref maintenant avant même qu'elles parlent direct c'est no and never. Quelle belle relation sincère et humaine entre deux personnes de culture différente.

Le frelon d'or : évidemment ces deux jours pleins dans les montagnes des alpes tonkinoises. J'en ai pris plein les mirettes. Même à Sapa, il y a encore des trésors juste là pour être vus et non pour être accaparés.
La pompe à vélo : Encore un bel exemple qui m'a convaincu du désastre de l'économie capitaliste. Je la haïssais déjà, je ne suis que renforcé dans mes convictions que cette économie sent la mort et apporte la désolation autour d'elle. Ici, à Sapa, le résultat est que l'on est prit pour des planches à billets rien de plus. Et que derrière ça, il y a clairement une ligne xénophobe et misérabiliste. Tu es blanc = tu es riche parce que tu viens d'un pays riche = tu peux, tu dois dépenser ton fric pour nous sauver de la pauvreté. Vaste connerie. Vous seriez étonnés de voir comment les gens ici possèdent deux, trois téléphones dernière génération, plusieurs motobikes, une grosse cylindrée genre SUV, maison, terrain et en plus la vie n'est pas chère. Ajouter à ça les sommes colossales déversées par les touristes chaque jour. Tout devient potentiellement un moyen de tirer du pognon. Heureusement ils ne font pas encore payer les entrées des rizières. Alors bien entendu, je suis aussi pris la dedans mais ça me pose quand même quelque cas de conscience. Le niveau atteint ici et ailleurs pousse de plus en plus de gens à être fataliste et à glisser vers une certaine forme de pensée unique fabriquée de toute pièce par quelques lobbys surpuissants. Hé !! WAAAAAKKKKKKKKEEEEEEE UUUUUUPPPPPPPPP comme dit ce grand philosophe Zack de la Rocha.
Le fun de la semaine : Ce matin je me réveille. Je vais pour petit déjeuner et acheter des fruits. L'ananas découpé se paye entre huit mille et dix mille dong (en gros 50 cents dollars US). La vendeuse m'annonce 30000 dongs. Je me tire et miraculeusement le prix descend, descend encore jusqu'a atteindre le prix donné pour tous y compris les locaux. Elle parle anglais et je lui demande : au lieu de nous prendre pour des jambons pourquoi tu ne me dis pas le prix correct tout de suite ? Elle me répond "white people". No comment.

Charpi

PS Musical de Charpi : Moanin’, de Wes Montgomery
PS Musical de Benjo : Walk this way, de Run DMC (feat. Aerosmith)