28 août 2012


Un post stone complètement Stones

En voyage, j’aime bien prendre un bouquin ou deux à feuilleter quand l’envie m’en prend. Sur une plage, en attendant un döner ou encore dans un bus non pourvu de TV. J’aime également quand je ne choisis pas ces livres de voyage. Je n’ai pas choisi l’autobiographie Life de Keith Richards (« Keef »), le guitariste des Rolling Stones, et je ne le regrette pas. Je ne l’aurais peut-être jamais lue si elle n’avait pas atterri un peu par hasard entre mes mains (merci Gui Roux quand-même). Quoi qu’il en soit je l’ai dévorée ; le Benj’ aussi d’ailleurs. Nous avons été gentiment bouleversés par le déroulement de sa vie : les rencontres, les anecdotes, les flamboyances et les désastres. Bref, nous nous battions littéralement pour lire cette tranche de life telles des groupies à bout de souffle. Nous voulions donc vous faire ressortir quelques réflexions tirées de cette œuvre déjà légendaire.
Lancez y donc un Can’t you hear me knocking tiré de l’album Sticky fingers, 1971.
Bien entendu les « musicos » du monde entier s’y reconnaîtront un peu plus. Ça parle d’instruments, de rock and roll… mais tous, vous pourrez un peu imaginer nos états de transe quand nous plongions dans la lecture et de manque maintenant que c’est fini… On espère que Mick Jagger prépare la riposte.

The Rolling Stones, vieux. De gauche à droite : Charlie Watts, Keith Richards, Mick Jagger et Ron Wood

Keef évoquant ses débuts à la guitare
« En 1959 […], oui j’ai commencé par où tout bon guitariste se doit de commencer : par le basique, la guitare acoustique et les boyaux. [ …]. C’est pareil pour tout. Y compris si tu diriges un bordel. [ …]. C’était juste un moyen pour parvenir à une fin : produire un son. [ …]. D’abord il faut maîtriser cette saloperie d’instrument. Il faut dormir avec. Si t’as pas de nana sous la main, tu couches avec ta guitare. Ça tombe bien, elle a la forme qu’il faut. »
==> Gimme shelter tirée de Letit bleed, 1969 (une composition initiale de Keef au moment où justement sa nana est dans une baignoire avec Mick, il est seul… la tempête gronde dehors. It’s just a shot away…)

Keef sur l’origine du nom du groupe
« Après avoir calculé combien ça nous coûterait, Brian Jones (guitariste, membre des Rolling Stones jusqu’en 1968, décédé un an plus tard) a appelé Jazz News, qui était une sorte de catalogue de tous les spectacles, et a dit : « on fait un concert à…
- C’est quoi le nom de votre de votre groupe ? ». On s’est regardé. « Ça » ? « La chose » ? Attention, le compteur tourne. Muddy Waters à la rescousse ! La première chanson sur son album Best Of s’intitule « Rolling Stone ». La pochette est par terre. En désespoir de cause, Brian, Mick et moi plongeons sans réfléchir : «  les Rolling Stones ». Waouh !! On avait économisé six pence. »
==> I just want to makelove to you tirée du premier album éponyme the Rolling Stones, 1964. Les Stones ont commencé par reprendre tous les standards de jazz et de blues à leur sauce, leurs premiers albums ne comportent que très peu de composition originales. Ici ils rendent hommage à Muddy Waters. Normal !

Séance de boulot avec Mick

Keef et la première composition des Stones
« L’histoire selon laquelle, Andrew Oldham, producteur de l’époque, nous a enfermé un jour dans la cuisine, à Willesden, et nous a dit : « allez, pondez un morceau » n’est pas une légende, ça s’est vraiment passé comme ça […] J’imagine que c’est parce que Mick et moi on trainait tout le temps ensemble à cette époque. C’est comme ça qu’Andrew l’a expliqué par la suite : « j’ai supposé que puisque Mick était capable d’écrire des cartes postales à Chrissie Shrimpton, mannequin et actrice anglaise, et que Keef pouvait gratter une guitare, ils devaient être fichus de composer des chansons ». Donc on a passé toute la nuit dans cette cuisine de merde, et bon, on était les Rolling Stones, quasiment les rois du blues, et on avait à manger, et on pouvait pisser par la fenêtre ou dans l’évier, alors ce n’était pas la fin du monde. Et j’ai dit à Mick : « écoute, si on veut sortir d’ici, on a intérêt à pondre quelque chose ». Curiosité de l’histoire, c’est Marianne Faithfull qui a enregistré en premier As tears go by (notre première compo originale) et qui en a fait un hit quelques semaines à peine après la scène dans la cuisine ».
==> As tears go by tirée de l’album December’s children and everybody’s, 1965. Profitez-en pour revoir le film Casablanca où elle apparaît dans la bande son.

Keef et le premier tube des Rolling Stones
 « Je l’ai écrit dans mon sommeil. Je ne le savais pas moi-même, c’est mon petit enregistreur à cassette Philips qui me l’a dit. Je ne sais pas ce qui m’a pris de vérifier la cassette ce matin-là, elle était toute neuve, j’avais donc dû la glisser dedans la veille au soir, et elle était à la fin. J’ai rembobiné et j’ai écouté « Satisfaction ». Ce n’était qu’une ébauche. Il y avait la structure de la chanson et le son n’y était pas, bien sûr, parce que j’avais utilisé une guitare acoustique. Après, on m’entendait ronfler pendant quarante minutes. »
==> I can’t get no satisfaction tirée de l’album out of our heads, 1965. Dire que Keef ne voulait pas la sortir en single. Le riff est largement inspiré de dancing on the street de Martha and the Vandellas sorti quelques semaines plus tôt

Keef, Mick et la compo chez les Stones
« En ce temps là, je définissais les riffs, les titres et l’accroche, et Mick se chargeait du reste. Ça fonctionnait comme ça, essentiellement. On ne se torturait pas trop, on n’avait pas besoin de méditer des plombes. Allez, l’histoire de celle-là c’est : « j’ai connu une salope de première dans tel bled. » A toi de jouer avec ça Mick. Je t’ai donné le riff de départ, baby. Pendant que tu trouves, je vais essayer d’en pondre une autre. Et il sait écrire, le Mick ! Donnes lui une idée et il t’en fera un roman. »
==> Under my thumb tirée de l’album Aftermath, 1966. Mysogines les Stones ? nooonnn !!! à peine théâtraux.

Keef, son premier grand amour Linda, et Jimi
« Et Linda Keith a rencontré Jimi Hendrix. Elle l’a vue jouer et a fait de sa carrière une croisade personnelle, essayant de lui trouver un contrat avec Andrew Oldham. Elle m’a raconté que dans son enthousiasme, au cours d’une longue soirée passée avec Jimi, elle lui a offert une Fender Stratocaster qu’elle a trouvé dans une chambre d’hôtel. Et, toujours d’après ses dires, Linda aurait dégoté chez moi une démo d’un single, chanté par Tim Rose, et l’aurait fait écouter à Jimi. Ça fait partie de l’histoire du rock : Jimi aurait découvert Hey Joe grâce à moi. »
==> Miss you tirée de l’album some girls, 1978. Selon Keef, Mick rentrait de boîte avec cette idée en tête. A part lui personne ne voulait se mettre à faire de la m…..e disco. Ils ont quand même essayé et tous ont produit le « meilleur titre disco du monde »

Keith et une de ses premières fans à gauche, Anita Pallenberg

Keef et  la musique blues
« J’ai oublié de mentionner que, pour moi, jouer le blues était un moyen de m’évader de l’alignement méticuleux des portées, avec leurs mesures comme autant de barreaux de prison et leurs notes entassées derrière comme des détenus à la mine triste »
==> Ventilator blues tirée l’album exile on the main street. Ça sent Chicago, le sud américain et le delta du Mississipi.


Keef, réflexion sur le beat
« Nous avons tous une manière élémentaire, primordiale, de réagir aux pulsations. Nous existons sur un rythme de 72 battements par minute. Le train a certes transporté le blues du Delta jusqu’à Detroit, mais il est surtout devenu un élément crucial de l’inspiration des bluesmen à cause du rythme créé par la machine et les rails – le train change de voie et le tempo change, mais le même écho raisonne encore dans le corps humain. Dès qu’il y a une machine ou un bourdonnement soutenu dans les parages, une musique existe déjà en nous. L’organisme humain perçoit des rythmes même lorsqu’il n’y en a pas. Le rythme doit être évoqué, pas imposé. C’est pour cette raison qu’on se goure quand on dit Rock : c’est le Roll qui compte, pas le Rock. »
==> Midnight rambler tiré de l’album let it bleed. La chanson évoquerait l’étrangleur de Boston, Albert de Salvo.

Keef à propos des enregistrements sonores
« […], puis tu rends grâce à Dieu pour les enregistrements. C’est la plus grande invention depuis l’Ecriture. »
==> Sway tirée de l’album Sticky fingers. Composée par Mick Taylor, le guitariste solo. Il n’est pas crédité. Tu parles, dejà à l’époque il fallait que ça soit Mick et Keef. Personne d’autre. Résultat il quittera le groupe en 1974.

Keef et l’art de la photographie
« Je trainais pas mal avec un autre copain,  Michael Cooper, photographe génial. Il tenait le coup pendant des heures, c’était incroyable ce qu’il pouvait ingurgiter comme came. C’est le seul photographe que j’ai rencontré qui avait la tremblote – et pourtant il ne ratait pas beaucoup de photo. « C’est quoi ton secret ? tu sucres les fraises, ça devrait être totalement flou ». Et lui : « J’appuie toujours au bon moment. »
==> Stray cat blues tirée de l’album Beggar’s banquet 1968. Avoir envie d’une groupie, ça n’est pas un crime…

Rock & Roll / whysky & Coke

Keef et la privation
« Une fois en studio, je branchais le magnéto sur un petit baffle, devant laquelle je posais un micro pour rajouter un peu de souffle et de profondeur, et c’était ça que j’enregistrais. Street Figthting Man, Jumpin’ Jack Flash et la moitié de Gimme Shelter ont été réalisées comme ça, au magnéto à cassette. Il n’y a pas un seul instrument électrique, sauf la basse que j’ai mixé ultérieurement. Rien que de l’acoustique. Peu après cette période d’expérimentation, les magnétos à cassette ont été équipés d’un limiteur qui t’empêchaient de saturer l’enregistrement. Toujours la même chose : dès que tu t’éclates avec un truc, on te met un cadenas dessus. »
==> Jumpin’Jack Flash tiré de l’album… ah bah non en fait juste un single en 1968 mais quel single !! Riff original du bassiste Bill Wyman qui n’a toujours pas digéré de ne pas être crédité. Quant à l’ami Keef pour lui c’est le seul riff qu’il voudrait jouer en permanence.

Keef  et le vol en bandes organisées
« Aujourd’hui, ils ont un tunnel, avec des cabines de péage devant lesquelles le flot des bagnoles de Douvres à Londres doit s’arrêter. Taxer les voyageurs est tout ce qu’il ya de plus légal, et les racketteurs sont en uniforme. Dans un cas comme dans l’autre vous êtes obligé de casquer ».
==> Parachute woman tirée de l’album Beggar’s Banquet. Mick et ses exploits sportifs.

Keef, les Stones et leur exil en France NDLR de Tour et Détours : un truc de fous, ça a bien changé !
« Quand les autorités nous ont matraqué avec leur super-méga-impôt. Je pense qu’ils s’attendaient à tout sauf à ce qu’on dise : « Ok, on se tire. On va se joindre à tous ceux qui ne vous paient pas ces sommes dingues. » On n’avait pas envie de se faire dépouiller alors on a surenchérie et on s’est cassé en France. Ce choix nous a hissé plus haut que jamais et a produit Exile on main street, peut-être le meilleur disque des Stones. »
==> Shine a light tirée de l’album Exile on the main street. C’est également le nom du film de Martin Scorsese réalisé sur les Stones en 2006.

Keef et l’héroïne
« Il y avait alors une loi merveilleusement bizarre, dans le cadre du système de santé public : si tu étais un junkie, tu t’enregistrais auprès de ton toubib, tu devenais « officiellement » dépendant de l’héro et on te donnait des petites pastilles de came pure, avec en rab, une petite ampoule d’eau distillée pour te l’injecter. Evidemment, n’importe quel camé va doubler la dose dont il a vraiment besoin. En même temps, que vous le vouliez ou non, il vous refilait l’équivalent en cocaïne, selon la théorie que la coke annulerait l’effet de la merde et ferait des junkies des membres respectables de la société. Alors les camés revendaient la coke, bien entendu, cela leurs permettaient de payer leurs loyers, et comme ils avaient gonflés leurs besoins en héro, ils avaient aussi la moitié de leurs doses à refourguer. Fantastique plan ! Et c’est seulement quand ce programme a été supprimé que la Grande-Bretagne a commencé à avoir un véritable problème avec la drogue. »
==> Sister morphine tirée de l’album Sticky fingers. La mort de Brian Jones et une overdose qui manque de les réunir concluent les Sixties de Marianne Faithfull. Elle écrit et chante Sister Morphine, mais le titre, jugé choquant, est rapidement retiré de la vente. Par la suite, les Rolling Stones en feront un tube (le texte est plus acceptable dans la bouche d'un homme) et le mérite de Marianne en cette occasion ne sera reconnu que beaucoup plus tard et Faithfull aime à la chanter sur scène et demander ensuite coquettement et avec assurance au public "je la chante bien ?"

Keef et l’acide
« Il n’y a pas grand-chose à dire sur l’acide, à part que c’est vraiment un trip incroyable. Le truc le plus dingue dont je me souvienne sous acide c’est un vol d’oiseaux – des oiseaux, des nuées d’oiseaux de paradis que je regardais passer et repasser devant mes yeux, sauf qu’ils n’étaient pas là. C’est pour ça que ça ne m’étonne pas que des gars sautent par la fenêtre : parce que tu as l’impression d’avoir compris d’un coup comment on fait. »
==> Dead flowers tirée de l’album Sticky fingers« L’héro » encore présente dans cette composition.

The Rolling Stones, jeunes. De gauche à droite : Ian Stuart, Keith, Brian Jones,
Charlie Watts, Mick, Bill Wyman

Keef et l’art de la fête
«  Je sais que je me suis vraiment lâché au cours de certaines soirées, parce qu’on me l’a dit, mais je ne me souviens de presque rien ! Une fête réussie c’est une fête dont on ne garde aucun souvenir. « Comment, tu ne te souviens pas du flingue, retourne le tapis, tu verras les trous dans le plancher, mec ! » J’étais un peu honteux et confus. »
==> Pass the wine (Sophia Loren) tirée de l’album Exile on the main street. Titre on ne peut plus évocateur pour faire la fête.

Keef et la remarque déplacée de Truman Capote
« Ca a chauffé. Je me souviens d’avoir défoncé la porte de sa chambre à coup de latte. Je l’avais préalablement aspergé de ketchup avec une bouteille que j’avais trouvé sur un chariot. « Tu vas sortir de là, espèce de vieille tante ? Pour qui tu te prends ? Tu veux du sang, tu vas en avoir, mais pas du froid ! On est sur la route, ce que tu as à me dire, tu me le dis ici, dans le couloir ! »
==> So divine (Aladdin story). Avec le Benj’ on se regarde… mais c’est Paint it black ?!… et puis ça retombe tout doux et c’est juste so divin.

Keef et l’art du couteau
« J’ai presque toujours un couteau sur moi, ça m’est arrivé de m’en servir pour m’expliquer ou me faire entendre. Les grandes règles du combat au couteau sont : ne t’entraînes pas, et si t’as un couteau, c’est pour ne jamais t’en servir. Ça sert à détourner l’attention. Pendant que ton adversaire regarde la lame d’acier luisante, tu lui en balance un dans les burnes qui lui font voir les étoiles, et il est à ta merci. Tu parles d’un conseil ! »
==> Wild horses tiré de l’album Sticky fingers. Une incroyable ballade à l’origine écrite par keef pour la naissance de son fils Marlon. Puis réécrite par Mick évoquant sa relation chaotique avec Marianne Faithfull.

Keef et l’art de la maïeutique
«  Si vous voulez tirer les vers du nez à quelqu’un, mon conseil est de le mettre sous dope pendant un mois ou deux, puis de la lui enlever : il parlera. »
==> Soul Survivor(alternate take) tirée de l’album exile on the main street, 1972. Celle-là a quelque chose de spécial, on ne pouvait pas y couper.



PS : Si vous avez lu l’intégralité du post et écouté tous les titres proposés, vous entrez dans la catégorie « FAN » 

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